Sondage | Baromètre Arabe : Les Tunisiens préoccupés par la situation économique

Selon un sondage réalisé par le réseau de recherche le Baromètre arabe, la majorité écrasante des Tunisiens considèrent que la situation économique du pays est préoccupante. Seulement 10% estiment qu’elle est bonne ou très bonne.  

Que pensent les Tunisiens de la situation économique du pays? Sont-ils satisfaits de la riposte du gouvernement au coronavirus ? S’accrochent-ils aux acquis de la liberté, même dans un contexte d’urgence sanitaire? Pour répondre à ces questions, le réseau de recherche le Baromètre arabe a mandaté une enquête qui s’est intéressée à la perception des Tunisiens sur plusieurs sujets, notamment la situation économique, l’action du gouvernement, les enjeux de la crise du coronavirus, etc.  Ladite enquête est encadrée par le professeur de l’université américaine de Princeton, Abdulwahab Kayyali, et réalisée, entre le 24 et le 28 juillet,  par l’Institut tunisien de recherche et de sondage One to one, auprès d’un échantillon représentatif de 1.000 personnes qui ont été interrogées par téléphone.  Le sondage a été, également, réalisé dans plusieurs pays arabes, notamment l’Algérie, le Maroc, le Liban et la Jordanie. Les résultats de  l’enquête ont été présentés lors d’un webinaire qui s’est tenu, mercredi 16 décembre, en présence du professeur Kayyali, du professeur d’économie à l’université de Tunis, Sami Aouadi, et de la professeure-assistante d’économie à la faculté des Sciences économiques et de gestion de Tunis (Fsegt), Donia Smaali Bouhlila.  

Perception des conséquences de la crise sur l’économie 

L’enquête révèle en somme que les Tunisiens s’inquiètent de la situation économique et des répercussions de la crise du coronavirus sur la pérennité de leurs emplois. En effet, plus de la moitié (51%) considère que la situation économique est le premier défi auquel fait face le pays.  Ceux dont le revenu ne couvre pas les dépenses sont les plus conscients des enjeux économiques (55%). Seulement 15% des Tunisiens considèrent que le coronavirus est le premier défi à relever, même si 60% d’entre eux craignent la propagation du virus. 

L’enquête met, en outre, la lumière sur les inquiétudes des Tunisiens quant à la dégradation de la situation économique.  Selon les résultats du sondage, seulement 10% des Tunisiens considèrent que la situation économique du pays est bonne ou très bonne, contre 50% au Maroc, 45% en Algérie et 24% en Jordanie. 70% des personnes dont le revenu ne couvre pas les dépenses sont négatives sur la question économique.  “Ces résultats reflètent les craintes des Tunisiens quant à la situation économique du pays. N’oublions pas que le sondage a été réalisé entre le 24 et le 28 juillet, c’est-à-dire durant une  période où il y avait une stabilité de la situation épidémiologique. En revanche, le pays connaît une forte récession avec une chute de 6% du PIB, un niveau d’inflation relativement élevé (5,7%) et une hausse du chômage”, a commenté la professeure-assistante Donia Smaali.  

Au sujet de la destruction des emplois, l’enquête montre un faible impact de la crise sur le marché de l’emploi, étant donné que 6% seulement des Tunisiens affirment qu’ils ont perdu définitivement leurs emplois, 50%  ont dû quitter provisoirement leurs postes de travail, 6% ont continué à travailler à distance et 37% se sont maintenus en situation d’emploi.  

La prise de conscience du fléau de  la violence faite aux femmes 

L’enquête a, également, mis le focus sur le sujet de la violence faite aux femmes durant la crise liée au coronavirus. Plus de deux tiers des Tunisiens estiment qu’il y a une hausse de la violence à l’égard des femmes. La gent féminine est la plus consciente de ce fléau : 70% des femmes affirment cette hausse contre 52% des hommes. 

“ Cette prise de conscience au sujet de la violence faite aux femmes s’explique par la présence et l’activisme des associations féministes en Tunisie. A cela s’ajoute un cadre juridique qui protège les droits de la femme, notamment la constitutionnalisation de l’égalité entre les deux sexes et l’adoption, en 2017, de la loi relative à la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Par ailleurs, il est à noter  que le nombre des cas de violence recensés  a connu une forte hausse, notamment durant la période du  confinement, étant  multiplié par  7 en comparaison à 2019”, explique Smaali. 

Au sujet de l’éducation, les Tunisiens sont craintifs vis-à-vis des effets  du Covid-19. Trois quarts des Tunisiens affirment  que les répercussions de la crise du coronavirus sur l’éducation sont négatives.

Ces effets sont ressentis d’une manière beaucoup plus importante par les personnes dont le revenu ne couvre pas les dépenses mensuelles (78%). 

Toujours, la défiance envers le gouvernement 

De même, la confiance en le gouvernement est au plus bas, avec 17 % seulement qui disent qu’ils ont confiance en le gouvernement contre 46% en Algérie et 52% au Maroc. 

De l’action gouvernementale, les Tunisiens ne sont pas, en somme,  satisfaits.  Ils  évaluent d’une manière négative l’action du gouvernement, puisque 39% seulement des Tunisiens affirment qu’ils en  sont satisfaits. Les jeunes sont les plus satisfaits avec 48% des moins de 29 ans contre 36% des plus de 30 ans. En revanche, les Tunisiens jugent appréciable la riposte du gouvernement au Covid. En effet, 58% disent qu’ils en sont satisfaits. Les universitaires sont les plus favorables dans leur évaluation (65%) par comparaison aux moins qualifiés. 

En outre, la perception de la corruption par les Tunisiens est toujours forte: la majorité écrasante (91%) pense que la corruption est répandue dans le pays. Seulement 43% des Tunisiens estiment que le gouvernement est en train de combattre la corruption. 

Par rapport aux  droits civils, les Tunisiens sont plutôt rassurés.

La majorité (72%) considère que les droits civils sont protégés et une minorité favorise leur restriction durant la pandémie. En effet, 67% pensent que les médias sont libres de critiquer l’action gouvernementale, 11% seulement pensent qu’il est légitime de limiter la liberté d’expression dans une situation d’urgence sanitaire et 30% justifient  la censure des médias dans un contexte de pandémie. 

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