Par où commencer ?

Editorial La Presse

Au vu de ses limites financières et de son manque de ressources, la Tunisie affronte la crise économique qui sévit depuis des années avec des handicaps à court terme et de sérieuses menaces pour l’avenir. A l’origine, une politique et un modèle post-Révolution peu innovants et largement en déphasage avec les défis de la nouvelle étape. Mais aussi une incapacité manifeste et déclarée à se projeter dans l’avenir et n’ayant jamais cessé pendant plus de dix ans d’entretenir un penchant naturel pour le «courtermisme». Au fil du temps, l’impatience devenait insoutenable. Il fallait bien se rendre à l’évidence et consentir que la Tunisie est malade et que le malaise est profond.

Dans une ambiance morose, d’animosité et de doute, le gouvernement essaie aujourd’hui de calmer un tant soit peu les inquiétudes, du reste légitimes, des citoyens. Mais, par où commencer pour redonner à l’économie tunisienne  son rayonnement d’antan et son rang ? Par où commencer pour rassurer le peuple ? Lorsqu’il y a un changement d’approche, de politique et de stratégie économiques, c’est toujours important de rompre avec le système et les modalités qui n’ont jamais fait leurs preuves et qui n’ont fait qu’enfoncer le clou. Il ne s’agit pas, en effet, de changer pour changer. Mais tout particulièrement de remettre les choses à leur vraie place tant qu’il est encore temps. 

Il est aussi important de savoir comment les Tunisiens ont vécu, et continuent encore de vivre, les effets et les répercussions négatives de la décennie noire,  pourquoi ils n’arrivent plus à joindre les deux bouts et à quel point ils espèrent  que tout cela change.

Pour autant, la Tunisie ne devrait pas se démonter et elle est appelée à continuer à chercher son salut sans relâche, même si elle reste encore marquée par des dérèglements fruit de faiblesses terriblement humaines et des écarts qui ont défait son histoire. Elle devrait entreprendre sa reconstruction, même si les plaies du passé sont encore béantes.

Il faut dire cependant que le redressement et la réhabilitation ne dépendent pas seulement des gouvernants, des hommes et des femmes qui sont aux postes de responsabilité. Ils ne se limitent en aucun cas aux performances économiques. Beaucoup plus que les résultats, ce sont les mentalités qui ont souvent marqué le fiasco de l’économie tunisienne. Si les solutions et les alternatives manquent, c’est bien parce que les esprits sont brisés. Et les illusions de grandir avec. Il y a tout un travail de fond à accomplir à ce registre.

Il y a un avis qu’il faut cependant  nuancer: ce qui paraît un échec sans appel peut devenir une réussite éclatante. Même dans les périodes sombres, il existe  toujours des compétences tunisiennes qui ne se sont jamais désunies avec les actes et les actions performants, l’efficacité et la créativité. Dans la « littérature » économique, il en est ainsi des réformes valorisées en fonction de leur utilité et de leur opportunité, mais aussi du savoir-faire de leurs auteurs. Ce qui revient à dire que l’économie tunisienne peut avoir la valeur de ce qu’elle possède. A condition qu’elle sollicite les hommes et les femmes qu’il faut à la place qu’il faut.

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