Notre artisanat face à la contrefaçon : La propriété intellectuelle, une marque de confiance

 

Certes, la qualité fait la différence, mais face à des flots de produits quasi identiques et non dégriffés, le consommateur tunisien semble avoir manqué de flair et de juste perception. Il ne sait où donner de la tête. Comment se protéger des griffes de la contrefaçon ?

Nos souks et médinas débordent, en toute circonstance de l’année, de nos beaux produits d’artisanat, étalés dans toutes leurs formes et couleurs, incarnant un legs ancestral qui rime avec une identité nationale socio-culturelle. Une expression artistique et économique typiquement locale, sans égale le sur le marché international.

Sans scrupules !

Toutefois, dans cet éventail de choix d’articles faits maison, l’on n’arrive plus à séparer le bon grain de l’ivraie. Certes, la qualité fait la différence, mais face à des flots de produits quasi identiques et non dégriffés, le consommateur tunisien semble avoir manqué de flair et de juste perception. Il ne sait où donner de la tête. Aussi faut-il être fin connaisseur ou professionnel du métier pour pouvoir se prémunir des griffes des contrefacteurs et contrebandiers. Ces faussaires qui n’hésitent point, sans scrupules, à doper le marché en produits et marques imités, d’où le risque d’en acheter sans les reconnaître. De faux artisans qui n’ont ni foi ni loi.

Alors, comment s’en protéger ? On avait, plus souvent, pensé au rôle capital du contrôle commercial et économique qui est censé être habilité à remettre de l’ordre dans le marché de l’artisanat. On y croyait fort. Toutefois, une telle mission acquiert, au préalable, des prérequis spécifiques et un savoir-faire professionnel, l’aidant à discerner le vrai du faux. Et si la qualité se paie, la contrefaçon, elle, nourrit le commerce parallèle. A force d’échapper à tout contrôle, l’informel s’étend, enfle et prend du volume, sans pour autant avoir une image de soi sûre et constante. Car, tout produit imité n’a pas une personnalité.

Quand l’ONA intervient !

Notre artisanat tire ses lettres de noblesse de son originalité et de son identité typiquement tunisienne. Le copier, à l’effet de le concurrencer, ne serait-ce que pour chercher à profiter de sa notoriété, est une opération qui ne peut que porter du tort à la profession. Et là, le contrefacteur se met, abusivement, dans la peau de l’artisan. Telle une grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf ! Et c’est là que le bât blesse. Car, faute d’un instrument juridique adéquat, rien n’empêche d’imiter les œuvres d’autrui et de s’attribuer toute idée ou initiation d’invention et de création. Ces imposteurs osent s’introduire sur le marché et vantent des produits contrefaits. Ils le font quotidiennement, n’ayant ni honte ni vergogne.

Cela dit, on s’approprie, sans coup férir, de droit de propriété intellectuelle, faisant fi de l’originalité du produit, portant ainsi préjudice à la réputation locale de l’artisan. Ce dernier se trouve, aujourd’hui, entre le marteau de la contrebande et l’enclume de la contrefaçon. Un tel phénomène du marché interpelle la majorité de nos artisans et devrait inciter les décideurs à trouver la solution.

D’ailleurs, l’intervention de l’Office national de l’artisanat (ONA) semble salutaire, à la seule condition d’élaborer un plan d’action de lutte visant à redorer le blason de ce secteur. Pas plus tard que lundi dernier, le directeur général adjoint de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle s’est rendu au siège de l’ONA à Den Den, où il a lancé le premier jet de nouvelles opportunités de partenariat dans le domaine de l’artisanat, afin de doter nombre d’artisans et artisanes des moyens de leur protection.

Se former pour se protéger

Désormais, 40 femmes artisanes, au sein du Hub Design Den Den, bénéficieront de sessions de formation, d’encadrement et d’accompagnement pour les initier à la culture de la propriété intellectuelle. Il s’agit, là, d’une opération pilote débouchant sur la sélection de 10 artisanes, dont le produit répond aux normes en vigueur de la qualité, ce qui lui permettrait d’être inscrit sur le registre de l’Innorpi. « Ce droit de la propriété intellectuelle le protégera, certes, de tout genre d’imitation et d’appropriation illicite, à même d’y apporter une valeur ajoutée, notamment sur le marché extérieur », explique, en ces termes, Faouzi Ben Hlima, directeur général de l’ONA. Un produit certifié s’offre ainsi une marque déposée que l’on retrouve dans les circuits commerciaux. Ça s’achète, ça se vend, d’une manière fluide. Le logo et la traçabilité du produit lui garantissent un bon écoulement sur le marché.

Dans le même ordre d’idées, M. Ben Hlima a ajouté que ces artisanes, choisies pour être les ambassadrices de la propriété intellectuelle en Tunisie, seront formées sur la qualité, le design et l’art de l’emballage. « Afin que leur produit soit bel et bien inscrit et enregistré à la propriété intellectuelle en tant qu’un label promotionnel non seulement localement, mais aussi à l’échelle internationale », a-t-il conclu.

En matière de propriété intellectuelle, tout brevet d’invention n’est remis qu’au produit officiellement certifié. En Tunisie, c’est à l’Innorpi, Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle, qu’est confié ce rôle de contrôle et de protection. Cela aide à protéger le secteur et valoriser ses compétences et son savoir-faire artisanal.

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