Le plan de développement a clarifié les intentions et la programmation des investissements dans les infrastructures pour la période 2016-2020. En mobilisant 60 milliards de dollars d’investissements sur cinq ans, —dont 60% proviendraient du secteur privé asiatique, européen et américain—, le Plan développement visait à atteindre un taux de croissance de 4% et à réduire le taux de chômage à 12% en 2020.


Lors de son lancement, le Plan de développement devait générer plus de 50 projets d’investissement, dont 12 PPP dans plusieurs secteurs. En 2018, le gouvernement a annoncé 34 mégaprojets pour un total de 9 milliards de dollars (22 milliards de dinars), soit un tiers du revenu national tunisien. Outre deux projets pilotes, 90% d’entre eux seraient en cours de développement.
En effet, il convient de noter que jusqu’à présent, aucun contrat d’infrastructure (Etat-payeur) n’a été signé dans le cadre de la nouvelle loi sur les PPP. De même, les huit appels d’offres publiés entre 2017 et 2019 relèvent de l’ancien régime de concession et ne figurent pas dans le plan de développement 2016-2020.

Projets non conformes
La plupart des projets de PPP en cours financés par le gouvernement, ainsi que les concessions récemment signées ou prévues, ne sont pas conformes au Plan de développement.
De prime abord, des projets ont été identifiés par la Banque mondiale en 2016 sans analyse d’impact préalable et avant l’adoption du Plan de développement 2016-2020. «Cela ne respecte pas le principe d’appropriation démocratique de son plan de développement par la Tunisie», précise l’Observatoire tunisien de l’économie. Ensuite, et jusqu’à aujourd’hui, seulement deux PPP financés par le gouvernement ( le métro de Sfax et la ligne de chemin de fer Gabès-Medenine) étaient initialement inclus dans le plan de développement 2016-2020, parmi les 12 projets de PPP. Un seul projet de PPP utilisateur-payeur, actuellement en cours de réalisation, est inclus dans le plan initial, celui du Port en eaux profondes d’Ennfidha, projet qui avait déjà échoué par le passé, à cause des problèmes d’expropriation foncière et d’indemnisation par l’Etat.

En ce qui concerne les concessions utilisateur-payeur accordées depuis 2017, aucune ne figure dans le plan de développement initial.
Ayant désespérément besoin d’attirer les investissements étrangers, la Tunisie semble prête à s’engager dans ses mégaprojets qui ne sont pas inclus dans le plan de développement 2016-2020 ou dans la sélection de projets 2018.
Les trois protocoles d’accords signés avec la Chine en 2019 qui sont de nouveaux projets tels qu’un métro à Nabeul, ou d’une étude d’un projet d’autoroute entre Boussalem et la frontière algérienne, n’avaient pas été inclus à l’origine dans les priorités du Plan de développement concernant les PPP mais sembleraient s’intégrer dans une stratégie de diversification des financements des projets PPP.

De même, la concession utilisateur-payeur pour le traitement et la valorisation des déchets ménagers et assimilés et pour l’enfouissement technique des déchets de Gabès, dont l’appel d’offres a été ouvert de décembre 2018 à février 2019, ne figurait pas sur la liste des projets présentés en 2018. En outre, «le projet est financé par un prêt de la Banque d’investissement allemande KFW au gouvernement tunisien, qui impose ses propres règles de passation des marchés d’approvisionnement, de travaux et de services associés dans le cadre de la coopération financière avec les pays partenaires dans ces projets, et ce, malgré le nouveau cadre législatif», souligne l’OTE.
Ainsi, le spectre d’un développement incontrôlé des PPP, d’une priorisation des projets servant des intérêts privés plutôt qu’à l’intérêt public, et des choix de projets dictés par les bailleurs de fonds, plane désormais sur la Tunisie. «Le pays a un besoin urgent d’investir dans ses infrastructures, mais il doit également prioriser ses investissements et contrôler sa dette en s’assurant que ses citoyens ont accès aux services dont ils ont besoin».

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