Pharmacies d’officine: entre acquis et vide juridique

Organisées chaque année à Tunis par le Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Tunis (Cropt), les journées pharmaceutiques sont devenues un rendez-vous professionnel incontournable pour tout le corps de métier, à savoir officinaux, hospitaliers, biologistes, industriels, grossistes répartiteurs, markéteurs pharmaceutiques. Au menu des Xes journées du Cropt tenues les 17/18 janvier dans un hôtel à Tunis, des conférences variées visant à assurer la formation continue aux participants, faire face aux problématiques inhérentes aux officinaux, proposer les solutions et combler le vide juridique dans certains secteurs.

Les journées ont été ouvertes le 17 janvier en présence des divers représentants des professionnels du secteur, du P.D.G. de la Pharmacie centrale, de la directrice de la direction de la pharmacie et des médicaments (DPM) et de la maire de la ville de Tunis, Souad Abderrahim, qui, rappelons-le, a obtenu son diplôme de pharmacie au début des années 90. Selon Docteur Hamada Oum Elkhir, pharmacienne d’officine et présidente du Conseil régional de l’Ordre des pharmaciens de Tunis, «chaque année, nous essayons de passer en revue ce qui a été fait et plancher sur les problématiques du secteur avec ce regard pointé vers le futur pour mieux avancer. Nous optons pour des thèmes qui peuvent être d’actualité, comme pour cette première conférence consacrée à la commande ferme où l’on rencontre une certaine ambiguïté au niveau des textes de loi».

La conférence tente de lever le voile sur la complexité et la lenteur au niveau de certaines procédures et d’apporter les solutions susceptibles de les simplifier et de les optimiser. Parmi les thèmes abordés lors de ces journées, les modalités d’obtention des certifications européennes pour les industries tunisiennes, les nouvelles cures anti-âges, la gestion des brûlures par les pharmaciens, le rôle de ces derniers dans les maladies non transmissibles, les exigences réglementaires pour la fabrication des compléments alimentaires, le cancer des poumons (le passé, le présent et le futur). Au niveau de l’industrie pharmaceutique, Dr Hamada a soulevé le problème de la certification et celui du contrôle des médicaments qui se fait parfois à l’étranger avec un coût élevé en raison de la dévaluation du dinar par rapport à l’euro. Il reste toujours le problème de la pharmacovigilance, soulève-t-elle

Légiférer pour combler le vide juridique
Le président du Conseil de l’ordre des pharmaciens, Chedly Fendri, explique que ces journées sont organisées par les différents conseils régionaux dans le cadre de la formation continue essentiellement scientifique mais aussi professionnelle et réglementaire comme la fabrication locale de compléments alimentaires qui connaît un vide juridique. Un décret-loi a été finalisé à cet effet pour organiser la fabrication, le stockage, la distribution et l’importation de compléments alimentaires. C’est important parce que le vide juridique risque d’avoir des effets néfastes sur la santé du citoyen. Se penchant sur le thème de la commande ferme, Dr Oum Elkhir Hamada et Dr Aïda Chekir ont présenté une exposition dédiée à cette procédure qui peut s’allonger dans le temps et ses contraintes.

A cet effet, elles rappellent que la Pharmacie centrale de Tunisie ne peut acheter que des médicaments ayant une autorisation de mise sur le marché (AMM) en Tunisie préalablement délivrée par le ministère de la Santé publique. La seule dérogation à cette règle consiste à importer en quantité limitée des médicaments (sans AMM) destinés à des patients nommément désignés. Les médicaments importés (sans AMM) mais légalement disponibles dans leur pays d’origine concernent en général peu de malades et correspondent à la définition générale des produits d’usage compassionnel. Le visa de la direction de la pharmacie et du médicament est indispensable pour l’importation, et ce visa n’est accordé que s’il existe une prescription médicale dûment justifiée. Pointant du doigt la complexité et la lenteur de la procédure de la commande ferme, les deux oratrices ont expliqué que le délai de la récupération des médicaments peut s’allonger d’une demi-journée à une douzaine de journées. Dr Aida Chekir évoque un circuit sur plusieurs étapes, une lenteur pour répondre au besoin urgent du malade, des produits qui ne sont pas pris en charge par la Cnam pour certains patients, sans compter les déplacements entre la direction de la pharmacie et des médicaments (DPM) et la Pharmacie centrale de Tunisie, le timbre fiscal à pourvoir et qui n’est pas rajouté au prix public.

La Pharmacie centrale, actualisation de la politique de vente
En termes de recommandations, on a insisté sur la nécessité de clarifier cette procédure et sa mise à jour dans un document plus pratique (guide pratique sur le site de la DPM et le site de la PCT), avec la possibilité de consulter le stock et le prix et faire des commandes en ligne. Aussi faut-il donner la possibilité aux grossistes de détenir et d’intervenir dans le circuit d’une manière légale, surtout pour les produits disposants d’une AMM, et créer une liste de produits urgents pouvant être stockés auprès des grossistes répartiteurs.

Le but final est de permettre l’accès au médicament innovant sur tout le territoire, la rationalisation de la distribution d’une manière équitable et la sécurisation du circuit de distribution et surtout faciliter la procédure de la commande ferme. De son côté, le P.D.G. de la Pharmacie centrale est intervenu pour expliquer que la PCT est en train d’actualiser sa politique de vente et de voir comment faciliter les moyens de paiement. Il a toutefois souligné que la consultation en ligne du stock des médicaments reste difficile à mettre en œuvre.

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