BCT | Évolutions économiques et monétaires : Un taux d’inflation moyen de 5,3% en 2020

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La dernière note sur «les évolutions économiques et monétaires et les perspectives à moyen terme» publiée par la direction générale de la politique monétaire relevant de la Banque centrale de Tunisie montre un ralentissement de l’activité économique en 2019. Ce relâchement est dû essentiellement à la contre-performance du secteur industriel, notamment les industries exportatrices et celui du transport. L’année dernière a aussi été marquée par la détente aussi bien de l’inflation que de l’inflation sous-jacente. Cette même année a connu une baisse notable du déficit courant à 8,8% du PIB, après avoir atteint un record historique de 11,1% en 2018. Cette performance a été atteinte grâce à l’amélioration de la balance des services et les répercussions de l’orientation restrictive de la politique monétaire sur la demande. L’année 2019 a aussi été caractérisée par une consolidation des réserves de change, qui ont dépassé, à fin 2019, la barre des 6,9 milliards de dollars, soit le plus haut niveau atteint durant les cinq dernières années.

Au cours du dernier trimestre de l’année 2019, le PIB, aux prix de l’année précédente, a connu une décélération pour s’établir à 0,8% en G.A. contre 1%, un trimestre auparavant. Ainsi, le taux de croissance annuel est revenu de 2,7% en 2018 à 1% en 2019. Cette évolution est principalement attribuable à la contre-performance des industries manufacturières et celles énergétiques qui a été, partiellement, compensée par l’évolution positive des services marchands et de l’activité agricole et de la pêche. Du côté du secteur des industries manufacturières, la valeur ajoutée aurait contribué négativement à la croissance du PIB en 2019, en relation, notamment, avec la dégradation de l’activité dans les principales branches exportatrices, à savoir les industries mécaniques et électriques (IME) et celles du textile, habillement et cuir (THC), à laquelle s’ajouterait la contraction de l’activité du raffinage du pétrole. Il est à noter que la demande européenne manufacturière adressée aux secteurs des IME et du THC semble négativement affectée par le ralentissement économique mondial et le «freinage industriel», spécialement, dans la zone euro.

Production nationale de pétrole brut : baisse de 7,3%

Aussi, l’activité de raffinage aurait affecté la croissance de 2019, suite à l’arrêt de la production au niveau de la Stir, qui a provoqué une chute de 87% de la production comparativement à l’année 2018. Les industries non manufacturières ont connu une baisse de leur valeur ajoutée en 2019, essentiellement imputable à la poursuite des difficultés au niveau du secteur énergétique. D’ailleurs, sur les 9 premiers mois de 2019, la VA de la branche «extraction de Pétrole et Gaz» a baissé de 8,1% par rapport à 2018. Sur l’ensemble de l’année 2019, la production nationale de pétrole brut a accusé une baisse de 7,3% après -0,4% en 2018 et -15,6% en 2017 et ce, suite aux arrêts répétitifs de la production dans les champs pétroliers, engendrés par la poursuite du déclin naturel et des troubles sociaux. De même, la production nationale de gaz a diminué de 12% sur la même période. Pour le secteur minier, la valeur ajoutée a connu une hausse, en 2019 par rapport à 2018. La production de phosphate s’est établie à son plus haut niveau jamais atteint depuis 2011, soit 4.108 mille tonnes en 2019, en augmentation de 46,6% par rapport à 2018. Cette hausse demeure bien en deçà des niveaux enregistrés au cours de la période d’avant 2010.

Grâce à la poursuite de la reprise de l’activité dans la branche «hôtellerie et restauration», le secteur des services marchands demeure le principal contributeur à la croissance du PIB, en 2019. Par rapport aux performances de 2018, les indicateurs du tourisme et du transport aérien ont affiché une nette amélioration en 2019 avec des taux de variation de +15,4% pour les entrées des non-résidents, de +10,9% pour le nombre de nuitées hôtelières et de +7,5% pour le nombre de passagers aériens. Il y a lieu de noter que le nombre de passagers aériens et les entrées des non-résidents ont dépassé les niveaux de 2010, de +15,4% et +4,3% respectivement. La valeur ajoutée de l’activité agricole s’est accrue de 1,7% sur les neuf premiers mois de 2019, portant la marque d’une campagne céréalière exceptionnelle qui s’est établie à 23,8 millions de quintaux et qui aurait compensé en partie la baisse importante de la production des olives à huile pour la saison 2018-2019.

Inflation sous-jacente élevée

L’inflation s’est établie, en 2019, à 6,7% en moyenne après 7,3% enregistré sur l’ensemble de l’année 2018. Cette évolution est imputable essentiellement à l’atténuation de l’inflation sous-jacente qui résulte du resserrement de la politique monétaire et de l’appréciation du dinar vis-à-vis des principales devises. Il est à noter que malgré cette détente, l’inflation sous-jacente demeure élevée, dénotant le caractère persistant de l’inflation.

En janvier 2020, le taux d’inflation a poursuivi sa tendance baissière pour s’établir à 5,9% (en G.A.) après 6,1% en décembre 2019 et 7,1% un an auparavant. Cet apaisement a été favorisé par la décélération des prix des produits alimentaires frais qui a été contrebalancée par la légère remontée de l’inflation sous-jacente et celle administrée. Au niveau des produits alimentaires frais, la décélération du taux d’inflation (5,4% après 7,6% en décembre 2019) est imputable, en premier lieu, à la baisse des prix des légumes (-1,1% après +3,6%) et de la volaille (-1,1% après +3,5%) et, dans une moindre mesure, à la décélération des prix des œufs (+6,8% après +10,7%) et de la viande (+10,0% après +12,3%) qui ont contrasté avec l’affermissement des prix des fruits (+12,5% après +9,7%).

Quant aux prix administrés, l’accroissement s’est poursuivi, en janvier 2020, à un rythme légèrement supérieur à celui du mois précédent (5,3% après 5,2%) portant la marque des ajustements à la hausse des prix du sucre (+4,0% après une variation nulle), du café (+2,3% après +0,2%), des tarifs de la poste (+40,9% après +5,3%) et du transfert d’argent (8,1% après une variation nulle), ainsi que de l’accélération des prix des produits pharmaceutiques (+7,4% après +6,6%).

Prix à l’import

L’indice des prix à l’importation a continué, en décembre 2019, sa détente, cela revient essentiellement, à l’appréciation du dinar depuis le mois d’avril 2019. Sur un an, l’indice global a évolué de +6,7% en décembre après +7,2% en novembre 2019 portant la marque du ralentissement des prix à l’import dans le secteur agricole et agroalimentaire et celui du textile, habillement et cuir, lesquels prix ont progressé respectivement de 0,2% et 4,9% en décembre 2019, et ce, après 5,0% et 6,2% un mois auparavant. De l’autre côté, une accélération des prix à l’import a été relevée au niveau du secteur des industries mécaniques et électriques (+11,0% après 9,8%).

Au vu des résultats de l’exercice de prévision du mois de janvier 2020, l’inflation devrait poursuivre son ralentissement pour s’établir aux alentours de 5,8% au cours du 1er trimestre de 2020 (contre 6,3% au troisième trimestre de 2019), bénéficiant d’une détente en perspective de l’inflation sous-jacente, à laquelle s’ajouterait un effet de base favorable provenant, notamment, des produits alimentaires frais. Egalement, on s’attend à une poursuite de la diminution graduelle de la principale mesure de l’inflation sous-jacente au premier trimestre de 2020 pour atteindre 5,9% en moyenne contre 6,5% au quatrième trimestre de 2019.

Un déficit commercial de 19,4 milliards de dinars

Les échanges extérieurs ont dégagé, en 2019, un déficit commercial de 19,4 milliards de dinars après 19 milliards en 2018. Le déficit de la balance énergétique s’est accentué en 2019 à environ 7,8 milliards de dinars, ce qui représente 40% du déficit commercial. Hors énergie, le déficit de la balance commerciale s’est rétréci légèrement, en s’établissant à 11,7 milliards de dinars contre 12,9 milliards de dinars en 2018. Les recettes d’exportation se sont élevées, en 2019, à 43,9 milliards de dinars contre 41 milliards de dinars en 2018. Cette légère amélioration s’explique essentiellement par la hausse des prix à l’export. En termes réels, les exportations ont accusé, en 2019, une baisse marquante de -5% après une hausse de 3,5% en 2018.

Une lecture sectorielle des exportations en volume fait apparaître une baisse quasi généralisée mais à des degrés différents. Le premier secteur exportateur, à savoir les industries des IME (44% du total des exportations en 2019), a enregistré une baisse notable du volume de ses exportations de -2,4% après -0,5% en 2018. Cette baisse émane notamment des retombées de la crise du secteur de l’automobile dans la zone euro depuis mi-2018. Le secteur des industries de THC (20,5% du total des exportations) n’a pas été épargné des répercussions de la régression de la production des industries du textile dans la zone euro. Il a affiché un net repli du volume de ses exportations, en 2019, de l’ordre de -6,2% après une hausse de 2,5% en 2018.

Le secteur de l’agriculture et des industries agro-alimentaires a également accusé un repli de ses exportations de -16,6% après une hausse de 42,1% en 2018, tiré par le recul des ventes de l’huile d’olive sur le marché international (172 mille tonnes contre 229,4 mille tonnes exportées en 2018). Le repli des exportations du secteur de l’énergie s’est poursuivi en 2019, quoique à un rythme moins soutenu (-7,3% après -16,5% en 2018), sous l’effet de la baisse de la production de pétrole.

Evolution de l’inflation à moyen terme

Le taux d’inflation s’est atténué à 6,7% en 2019, après un pic à 7,3% en moyenne en 2018. Les dernières prévisions de la BCT laissent entrevoir une poursuite de cette graduelle détente du rythme de progression des prix à la consommation dans les mois à venir. Elles tablent sur un taux d’inflation moyen de 5,3% en 2020, niveau auquel il devrait se stabiliser aussi en 2021. L’inflation des produits administrés devrait poursuivre son ascension durant le premier trimestre 2020, pour atteindre un niveau historiquement élevé de 5,5%, et serait portée par la hausse des prix de certains produits à prix administrés, prévue dans la LF2020 et un effet de base haussier important. Au-delà, l’inflation des produits administrés devrait s’atténuer graduellement pour avoisiner 3,9%, sur l’ensemble de l’année 2020 et 2,7% en 2021, après avoir atteint des niveaux historiquement élevés durant les deux dernières années (4,6% en 2018 et 4,7% en 2019). Quant à l’inflation des produits alimentaires frais, elle devrait s’inscrire en baisse graduelle, revenant de 8,3% en 2019 à 6% en 2020 et 5% en 2021.

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