Diriger un club comme le CA ne s’improvise pas : La saison de tous les paradoxes

Le CA  a failli passer de vie à trépas sans que personne parmi les figures emblématiques du club ne lève le petit doigt. On constate, on observe cette relation ambivalente, à la limite complexe entre un bastion et ses soutiens avant que les fans ne prennent les choses en main, à juste raison d’ailleurs.

La citadelle clubiste peut donc respirer. Après deux contreperformances successives, le CA a renoué avec la victoire au Bardo, ce qui lui a permis d’assurer son maintien en Ligue 1. Le CA qui joue le maintien, c’est inédit dans nos contrées et il va falloir en tirer les conclusions, faire son examen de conscience et comprendre pourquoi et comment le Club Africain en est arrivé là. Cette saison, le CA a bel et bien tremblé. Franchement, l’on a craint le pire en fin de phase aller avec un onze clubiste léger, inconsistant et surtout envahi par une certaine fatalité. Et comme à l’accoutumé, quand ça bloque sur le terrain, l’équipe s’en remet au public pour se réinventer. Sauf que cette fois-ci, ce n’est pas sur les travées du stade que le miracle s’est produit mais dans les chaumières clubistes. Sentant le danger, les fans ont battu le rappel et sonné la charge. Levée de boucliers, exit le président et son escouade. Main tendue aux tauliers que sont Saber Khelifa, Bilel Ifa, Zouheir Dhaouadi et autre Hamza Agrebi. Collecte sans précédent afin de parer au plus pressé, définition des priorités : tout a changé du tout au tout avec un CA qui a par la suite tracé son sillon sans sourciller.

Etat fusionnel et ambivalence d’une relation

Au final, sur l’ensemble de la phase retour, le CA se classe second, à des années lumières de sa position de l’aller où il a fini avant-dernier. Cet «exploit» pourrait presque faire oublier une saison mouvementée et gâchée. Mais il ne faut pas avoir la mémoire courte. La première partie de saison a failli acter le crépuscule clubiste avec des résultats en berne, une équipe qui se banalise et des supporters furieux, le tout sur fond de gestion désastreuse. Voilà pour le volet fiévreux du CA. Un Club Africain qui a failli passer de vie à trépas sans que personne parmi les figures emblématiques du club ne lève le petit doigt. On constate, on observe cette relation ambivalente, à la limite complexe entre un bastion et ses soutiens avant que les fans ne prennent les choses en main. Youssef Elmi est intronisé, la communication est repensée et le CA peut à nouveau entrevoir une sortie de crise. Et après le doute et l’angoisse, le miracle. Le CA se relève, se remobilise, ne se voile plus la face et ne fuit plus ses problèmes. Cette fuite en avant qui, par le passé, n’a fait qu’augmenter la distance de la solution. En football, tout comme ailleurs, la meilleure façon d’échapper à ses problèmes est de les résoudre ! C’est donc avec l’espoir d’un impensable exploit qui masquerait en partie ce qui restera comme la plus noire de l’existence de l’institution clubiste que les nouveaux tenants du club ont abordé cette fin de saison. Le CA a, certes, touché le fond, mais après l’épreuve, il y a le défi. Le défi de sauver un club centenaire du purgatoire, des menaces de la Fifa et des innombrables sommations de ses créanciers.

Qui veut aller loin ménage sa monture 

Assurément, le CA n’est pas passé loin de la «correctionnelle» au vu de tout ce gaspillage affligeant des énergies clubistes. Gaspillage mais aussi gâchis et désordre résultant de dérèglements et d’une mauvaise gestion de la part d’une administration défaillante qui dépense et consomme sans discernement, inutilement même tantôt! « Qui veut aller loin ménage sa monture ». Force est de constater que cette citation n’a pas inspiré l’exécutif en place en début de saison. A cet effet, l’on se rappelle d’ailleurs qu’outre l’incompréhension mutuelle, la première partie de saison clubiste s’était  aussi transformée en une immense partie de poker menteur, rythmée par des fuites dans la presse, de vraies-fausses démissions qui ont semé la zizanie et des coups d’intox. L’ambiance était délétère autour de l’association de 1920 et même l’enlisement du CA au classement n’a pas éveillé les consciences par moments. Du jamais vu au CA ! Il va falloir maintenant évaluer, débriefer, faire le point et revisiter cette «annus horribilis» sans se limiter comme souvent à dénoncer des complots extérieurs. Au CA, par le passé, anciens présidents,  FTF, DNA… Tous ont servi de boucs émissaires pour expliquer les mauvaises passes successives. Or, cette saison et celle d’avant, le CA a pratiqué l’automutilation avec une rare abnégation.  Le CA ou la faute originelle : le drame, qui se joue et qui se noue depuis des années au Parc A, est bel et bien une résultante de l’absence totale d’un management digne de ce nom. Au final, au sein du microcosme clubiste, tout le monde est perdu et épuisé.

Besoin de cohérence globale

Diriger un club comme le CA ne s’improvise pas. Abdessalam Younsi s’en est remis à  la «métaphore du surfeur» en voulant dominer une vague trop haute pour lui. Il est tombé et se prend maintenant toutes les vagues suivantes dans la figure ! Mais l’ex-président du CA est loin d’être l’unique responsable de la situation. Avec Slim Riahi et sa surface financière,  il n’y a pas aussi eu de cohérence globale au CA, tantôt un consensus sans plus. Maintenant, aujourd’hui, la pression est quelque peu retombée même si l’histoire nous apprend que le quotidien a toujours été aussi mouvementé que les tourbillons de poussière du sirocco tunisien. Car le CA est bel et bien un modèle réduit de notre pays où les relations sont aussi variables que la température de la Méditerranée avec un jour chaud, puis le lendemain glacial. C’est donc en plein cœur du maelström clubiste que Youssef Elmi devra œuvrer. Œuvrer pour que le CA soit de nouveau compétitif et agir afin qu’à terme, la frustration ne guette plus les fans. Des fans qui attendent déjà les prochaines échéances avec une impatience non dissimulée.

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