Dans la foulée de la fête nationale de la femme : Le CSP nécessite-t-il d’être relu ?
La Tunisie vient de célébrer, le 13 août, comme chaque année, la fête nationale de la femme, tout en commémorant la promulgation du fameux Code du statut personnel (CSP).
Un acte législatif solennel accompli en 1956 avec autant d’audace et de délicatesse par le premier président de la République tunisienne, Habib Bourguiba.
La Presse — Soixante-neuf ans déjà, on lui doit encore la promotion de la femme et de la famille, colonne vertébrale de la société et seule garante de son épanouissement et de son progrès. Mère au foyer, ouvrière de chantier ou cadre au poste de décision clé, la femme tunisienne, étant fière de cet acquis prestigieux, reconnaît à Bourguiba, père fondateur de la nation, une telle entreprise libératrice. Le CSP, ce livre d’or aux atouts majeurs, premier de son genre dans le monde arabe, lui avait conféré une place de choix.
Un véritable exploit !
C’est ainsi qu’elle a, depuis, accédé à un nouveau statut social, l’érigeant au rang d’une citoyenne à part entière, égale à l’homme en droits et devoirs. Tous sont égaux devant la loi, ce qui confère à la femme tunisienne une position bien méritée dans son entourage maghrébin et africain.
Ce fut, alors, un véritable exploit ! D’ailleurs, l’idée de lui consacrer un texte pareil propre à elle, au sein d’une société ultra-conservatrice, machiste était alors perçue comme une aventure risquée à bien des égards.
A cette époque, il n’a jamais été aussi facile de briser tous les tabous et tolérer un certain mouvement d’émancipation féminin. Faire sortir la femme du carcan de l’ignorance pour ouvrir devant elle de nouveaux horizons a été jugé une œuvre révolutionnaire à plus d’un titre. Toutefois, la femme tunisienne n’aurait jamais imaginé qu’un tel acquis capitalisé au fil des ans aurait pu être, un jour, confisqué ou relégué au second plan.
Fini le temps de Bourguiba, son successeur n’en avait pas assuré la continuité ! Durant le règne de Ben Ali, la promotion de la femme n’était, alors, qu’une politique de façade, ayant bien servi l’image d’un régime. Pas grand-chose n’a été ajouté à l’existant. L’héritage bourguibien tel que conçu et préservé est encore là, témoin d’un parcours féminin aussi militant.
Soit un combat historique acharné contre toute tentative attentatoire à son image et à ses droits acquis : violence faite à son encontre, harcèlement, intimidation au travail, surexploitation, emploi précaire, autant d’injustice et d’exclusion que l’on perçoit au quotidien.
Pour que personne ne soit laissé de côté !
Cette contre-morale qui fait froid dans le dos nous laisse pantois face à l’avenir de toute une génération. Quel sort réserve-t-on à la jeune fille, à la famille, à la société tunisienne tout entière ? En ce 13 août, la fête nationale de la femme aurait dû avoir un aspect significatif, censé changer de paradigme et réviser toute notre stratégie sociale.
Commençons ainsi par la famille, dans sa structure fondamentale, en passant par la restauration de la vie des couples, jusqu’au développement du capital humain. Cela étant, l’on doit recouvrer ses droits d’accès à l’éducation, à la santé, au transport en commun, au marché de l’emploi, pour reconquérir la confiance du citoyen tunisien dans l’Etat des droits et des institutions.
Le CSP, lui-même, nécessite d’être relu, plus qu’une fois, afin de l’actualiser et de le rendre au diapason des exigences actuelles de la société.
Sans pour autant oublier le vécu alarmant des femmes en détresse, sans soutien, femmes agricoles, travailleuses des chantiers et bien d’autres «damnées de la terre». En fait, l’Etat, comme l’a souligné, à maintes reprises, le Président Kaïs Saïed, est appelé à reprendre son rôle d’antan, celui de protection sociale pour que personne ne soit laissé de côté.