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Culture

Chroniques de la Byrsa : Leçons d’une grève

  • 3 août 18:20
  • 3 min de lecture
Chroniques de la Byrsa : Leçons d’une grève

La Presse — Les voyages forment la jeunesse de 7 à 77 ans et même au-delà en ce qui concerne votre humble serviteur qui, à plus de huit décennies, continue de se former à cette école-là, quels que soient le trajet qu’il parcourt et le moyen de locomotion qu’il emprunte.

Le récent débrayage des agents des transports publics lui a permis de découvrir ou de redécouvrir des réalités que le ronron du cours ordinaire des jours qui s’écoulent dans une retraite qui se voulait paisible avait tendance à lui faire oublier.

Ce jour-là — le premier des trois —, il est allé se planter tranquillement à l’emplacement de l’arrêt de bus qui d’ordinaire conduit vers la capitale. Une poignée d’usagers est venue se joindre à lui au cours de l’interminable attente du véhicule venu de loin, il est vrai, de Paris, imaginez-vous, puisqu’il avait, dans une vie antérieure, desservi des circuits dans la capitale française.

Bref, tout le monde attendait avec résignation quand un passant rappelle charitablement à l’assistance que la desserte est en suspension du fait d’une grève générale qui paralysera la circulation des moyens de transport public pendant trois jours à travers tout le pays. 

La petite foule se dissipe dans la perplexité : où aller et comment ? Me concernant et devant à tout prix me rendre en ville, je me résolus au sacrifice d’une course en taxi. Ma pension de retraité ne permettant pas des prodigalités, j’ai tout de même cherché à partager la charge avec deux autres usagers devant eux aussi faire le déplacement. Ils acceptèrent avec empressement, signe que, eux aussi, n’étaient pas tout à fait riches.

Une fois embarqués, nous voici en présence d’un jeune chauffeur compatissant qui, au vu des gens qui, de partout, le hélaient désespérément, les taxis se faisant à leur tour rares devant la demande inhabituelle de ce jour. « Bon Dieu, pourquoi avoir interdit le covoiturage dans un pays si mal desservi par le transport en commun ? ». Et voilà de quoi meubler la discussion durant le trajet de plus d’une dizaine de kilomètres qui mène à la capitale.

Le « taxiste », jeune, solide et sympathique gaillard mais qui était également braillard, semblait ne pas être au courant que la décision était intervenue suite à la demande pressante de ses collègues qui dénonçaient à force de grèves-surprises une présumée concurrence déloyale de bons pères de famille qui demandaient à leurs compagnons de route occasionnels de s’acquitter d’une dîme en contrepartie de leurs services.

Le covoiturage est un service qui consiste à regrouper par roulement des propriétaires de voitures pour se rendre à leur travail et en revenir dans un seul véhicule. Cela réduirait considérablement le nombre inouï de véhicules qui circule avec le seul conducteur à bord, ou presque. Il y aurait alors moins d’engorgements sur les routes avec leur cortège de crispations, de pollution et de retards. Avec, en prime, une économie substantielle d’énergie. Et si cela devait s’accompagner de quelques tricheries, il serait relativement facile de fouetter le chat fautif.  

Tel était le raisonnement de ce jeune écervelé. A méditer tout de même.

Auteur

La Presse

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