La Presse — Ce phénomène des agents de joueurs influents dans notre football n’est pas une imagination ou des palabres reliés-ici et là. Vous n’avez pas idée à quel point ces agents de joueurs (une bonne partie d’entre eux) influencent le football tunisien, championnat et sélection.
Omniprésents partout, envahissants, opportunistes en grande partie, prêts à tout pour imposer leurs joueurs (malheureusement réduits à une notion de produits ou de marchandises), ces agents, ou les plus puissants d’entre eux, sont la variable la plus lourde et incontournable dans notre football en ce moment.
La question n’est plus de commercialiser un joueur ou de négocier le renouvellement d’un contrat, on est dans une étape avancée du lobbying. Une bonne partie de ces agents, à différents niveaux, sont maintenant présents dans les clubs à travers des dirigeants complices. Ces agents tirent les ficelles et renvoient des entraîneurs et ramènent d’autres en ayant un champ extraordinaire d’influence dans les coulisses.
Dans les vestiaires, plein de joueurs nous racontent comment certains de leurs collègues, moins valeureux et moins nantis, jouent et s’imposent sur l’entraîneur et les dirigeants grâce à leurs agents. Ce sont des histoires qu’on raconte partout sur notre football, mais, officiellement, c’est un tabou, parce tout se passe en catimini, dans des lieux discrets avec des dirigeants qui, par complaisance ou par manque de personnalité, cèdent un énorme champ à ces agents.
Tel l’immobilier, la Bourse des valeurs mobilières, le commerce, le tourisme, ces intermédiaires deviennent puissants dans le monde entier avec un argent fou gagné. Mais, si, à l’étranger, les règles sont fixées et chacun plus ou moins connaît ses limites avec un système assez régulé, ici, c’est un décor désordonné. Un chaos général où les règles sont bafouées.
Seuls ces joueurs et ces entraîneurs ont été les premiers gagnants de ce faux professionnalisme de notre football. Et peu à peu, leurs agents et certains de ces avocats du sport ont appris à gagner en pouvoir et en argent aussi. On ne parle plus de commissions gagnées et de plus-values, on parle maintenant d’agents décideurs et qui tracent les plans et influencent les choix des dirigeants.
Quand vous voyez des joueurs médiocres présents d’une saison à une autre et qui grillent d’autres joueurs plus talentueux, quand vous voyez les avantages mis dans les contrats de maints joueurs, quand vous constatez que certains entraîneurs, dont quelques-uns ayent une longue expérience, faire des choix incohérents et insister sur des joueurs ratés, vous ne pouvez que poser des questions.
Et sans se casser la tête, ces questions resteront en suspens. Parce que les dirigeants d’aujourd’hui sont en grande partie mal conseillés et certains d’entre eux voraces et cherchant à gagner de l’argent et du relationnel. Si on s’amuse à connaître les noms des agents des joueurs qui jouent toujours dans les clubs surtout favoris et ceux de la sélection, vous trouverez les mêmes agents qui reviennent !
Une poignée d’agents qui, maintenant, passent de l’autre côté, c’est-à-dire dans les comités directeurs. Tous les moyens sont bons pour imposer ses joueurs ou son entraîneur et pour barrer la route aux joueurs des agents concurrents. Mieux, les plateaux radios populaires et les émissions télé sont aussi un moyen très efficace pour le faire. Des agents de joueurs se transforment même en chroniqueurs. Une comédie noire !