Chine – Lutte contre la pauvreté : Au Ningxia, une leçon universelle
Avec une croissance du PIB de 5,4 % en 2024 et des investissements publics dépassant 12 milliards de yuans, la région autonome de Ningxia s’impose comme un modèle de dynamisme économique intérieur en Chine. Entre agriculture de spécialité, industrialisation ciblée et développement des services, elle démontre qu’une stratégie régionale peut transformer un territoire aride en moteur de croissance durable.
La Presse — Dans les vastes étendues arides du nord-ouest chinois, la région autonome de Ningxia s’affirme aujourd’hui comme un exemple vivant de transformation économique et sociale. Jadis zone oubliée, victime de désertification et de marginalisation, la région autonome Hui est devenue un laboratoire d’innovation en agriculture, industrie et services. Voici comment, en 2024 et 2025, le Ningxia poursuit son essor et inspire le monde.
Une croissance stable et inclusive
En 2024, le Ningxia a enregistré une croissance du PIB de 5,4 %, se classant 6e en Chine, un niveau remarquable pour une région intérieure, selon des données officielles. Les trois secteurs économiques ont tous progressé : l’agriculture (+ 6,2 %), l’industrie (+ 7 %) et les activités hors industrie (tertiaire) ont contribué à cette dynamique.
Sur 2025, la région vise un PIB en hausse de 5,5 %, avec des augmentations similaires attendues dans chacun des trois secteurs. Par ailleurs, le revenu disponible par habitant devrait croître de 6 %, et le gouvernement prévoit d’investir 12,5 milliards de yuans (1,7 milliard $) dans l’amélioration des services publics sur 40 axes différents.
L’essor ne se fait pas sans efforts pour l’emploi. En 2025, près de 800.000 travailleurs ruraux sont attendus dans le secteur non-agricole, 80.000 emplois urbains supplémentaires seront créés et 25.000 postes publics seront ouverts, avec la promesse d’un emploi garanti pour chaque famille sans emploi.
Vignes, baies de goji et agro-technologies
Le Ningxia a su convertir son climat sec, ses froids extrêmes, ses grands écarts de température, peu de pluie en atout pour les cultures de niche comme le raisin et la baie de goji. D’ailleurs, 606.000 mu (≈ 40.000 hectares) de vignes plantées, 140 millions de bouteilles produites par an, pour une valeur de 45 milliards de yuans.
Le tourisme œnologique attire plus de 3 millions de visiteurs en 2024. L’obsession du détail est poussée loin : des labels bio européens, 1.800 prix internationaux et des normes extrêmement précises en culture et vinification. Si bien que l’adoption de l’agriculture numérique va crescendo : relevés de sols connectés, irrigation de précision, QR codes pour traçabilité.
Tout cela fait monter le rendement (jusqu’à 800 kg/mu), la teneur en sucre, tout en réduisant la consommation d’eau de 30 %. Pour ce qui est des baies de goji, le Ningxia produit 55 % du goji chinois. Les prévisions de 2025 tablent sur 46.000 hectares plantés, 700.000 tonnes récoltées, pour une valeur de 50 milliards de yuans. Les produits dérivés se diversifient: pulpe, poudre, snacks, boissons, même cosmétiques avec des marges qu’on imagine multipliées par jusqu’à 100 fois selon la transformation.
Un modèle global de développement régional
La transformation du Ningxia n’est pas chanceuse : elle est orchestrée par un État proactif et stratège. Outre les investissements massifs, un accent a été mis sur la formation professionnelle, la reconversion des ruraux vers l’emploi urbain, ainsi que la création de services sociaux.
Autre exemple frappant : l’expansion des zones industrielles comme la plateforme « Ningdong » et le parc technologique de Desheng témoignent de la diversification. Des dizaines, voire des centaines de projets structurants y sont réalisés, avec des milliards de yuans investis. Le gouvernement miserait même sur les « industries de la rencontre » œnotourisme, festivals, « wine + camping », intégrant plaisir, économie et modernité locale.
Même dans cette effervescence, certains défis persistent, néanmoins : écart de revenus entre zones rurales et villes, adaptation difficile pour certains agriculteurs relocalisés en zones urbanisées et remise en question de la durabilité, dans un modèle encore fortement dépendant des financements publics.
Reste à dire que le Ningxia incarne magnifiquement la stratégie chinoise de lutte contre la pauvreté, fondée sur la combinaison de croissance économique, interventions ciblées et innovation locale. En quelques décennies, une terre hostile s’est muée en région viticole de haut niveau, en pôle agro-industriel spécialisé et en destination touristique originale.
Morale de l’histoire : avec une vision claire et des moyens appropriés, même les territoires les plus arides peuvent se transformer en terres fertiles et agréablement vivables.