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Economie

Exportation de l’huile d’olive tunisienne : S’inspirer des stratégies des concurrents

  • 3 octobre 18:10
  • 4 min de lecture
Exportation de l’huile d’olive tunisienne : S’inspirer des stratégies des concurrents

La saison des olives approche à grands pas. Cependant, alors que la Tunisie figure parmi les trois premiers producteurs mondiaux d’huile d’olive, sa filière reste dépendante de l’Union européenne et peine à capter la pleine valeur de son produit phare.

Pour maintenir sa compétitivité et sécuriser ses recettes en devises, le pays doit impérativement diversifier ses marchés et s’inspirer des stratégies de ses concurrents directs.

La Presse — Avec plus de 80 millions d’oliviers couvrant 1,8 million d’hectares, la Tunisie détient la plus grande surface oléicole au monde après l’Espagne. Sa production annuelle oscille entre 150.000 et 300.000 tonnes selon les saisons, dont plus des deux tiers sont exportés.

En 2024, les exportations tunisiennes d’huile d’olive ont rapporté environ 2,1 milliards de dinars tunisiens, soit près de 40 % des exportations agricoles et 10 % des exportations totales. Mais 80% des volumes sortent en vrac, souvent réemballés en Espagne ou en Italie, ce qui prive le pays de gains significatifs.

L’Espagne, la Grèce et le Maroc en avance

L’Espagne, premier producteur mondial, avec une moyenne de 1,4 à 1,6 million de tonnes par an, a construit sa puissance grâce à une intégration verticale : production, conditionnement, distribution et un marketing très agressif sur les marchés asiatiques et américains.

La Grèce, bien que plus petite (250.000 tonnes en moyenne), valorise davantage son huile en misant sur les appellations d’origine protégée (AOP) et une identité forte liée au régime méditerranéen.

Le Maroc, avec environ 200.000 tonnes, suit une stratégie proche de celle de la Tunisie mais a investi massivement dans la modernisation des huileries et la montée en gamme des huiles conditionnées, bénéficiant d’un fort soutien public.

A l’inverse, la Tunisie reste trop concentrée sur l’UE (70-80 % des exportations) et n’a pas encore bâti une marque «Tunisia Olive Oil» en langue anglaise, et non française, forte et reconnue.

Nouveaux marchés : opportunités et obstacles

Les Etats-Unis, deuxième importateur mondial (plus de 400.000 tonnes/an), absorbent environ 10 % des exportations tunisiennes. Les huiles biologiques et premium y trouvent un fort potentiel.

Pour l’Asie, la Chine et le Japon, la consommation croît à deux chiffres, mais les investissements marketing sont indispensables pour percer. L’Espagne y est déjà dominante.

Encore marginale (moins de 2% des exportations tunisiennes), l’Afrique subsaharienne représente un futur relais de croissance avec l’émergence d’une classe moyenne.

Leviers de compétitivité et stratégie nationale à bâtir

La Tunisie est appelée à augmenter la part de l’huile conditionnée (aujourd’hui limitée à 20 % des exportations).

Elle doit aussi investir dans la traçabilité et la certification (AOP, bio, halal) pour capter les segments premium. S’y ajoutent l’amélioration de la logistique et les ports, souvent jugés coûteux et peu performants et la négociation de nouveaux accords commerciaux au-delà du contingent européen de 56 700 tonnes exemptées de droits de douane. 

La Tunisie dispose, au demeurant, d’atouts naturels considérables : qualité reconnue, savoir-faire ancestral, coûts de production compétitifs. Mais sans une stratégie claire de montée en gamme et de diversification, elle risque de rester cantonnée au rôle de fournisseur de vrac pour ses voisins européens.

Pour transformer l’« or vert » en moteur de croissance durable, le pays devra s’inspirer du modèle espagnol en matière de marketing global, tout en valorisant son identité propre : une huile issue d’un terroir millénaire, symbole du régime méditerranéen authentique.

Auteur

La Presse