Viandes rouges : Une question de reprise en main pleine et entière
Quelque part, on ne semble pas encore convaincu que la consommation est l’aboutissement d’une chaîne. Une chaîne dont le premier maillon est le producteur.
Et qu’il s’agisse d’un produit agricole ou manufacturé, c’est le même cheminement, avec bien entendu un changement des intervenants.
La Presse — Nous nous appliquons à moderniser nos télécommunications, notre système de santé, nos routes, nos réseaux électrique et de distribution d’eau, etc.
mais nous continuons à sacrifier un mouton, une vache ou un chameau, sur un trottoir, au pas d’une boucherie, un peu partout sans contrôle vétérinaire ou sanitaire.
Cela fait d’ailleurs le bonheur des millions de touristes qui prennent des photos souvenir. Une honte à tous les points de vue, vis-à-vis de l’histoire de notre civilisation millénaire.
Toute cette entrée en matière pour rappeler que le problème des viandes rouges, cycliques, revient régulièrement à l’ordre du jour avant Ramadan ou l’Aïd.
Tout cela parce que tout simplement, on n’a pas daigné s’en occuper sérieusement. Comme pour le problème des dépôts et des chambres froides frauduleusement installées, qui maintenant tombent régulièrement, grâce à la mise en place des nouvelles unités spécialisées de la garde nationale municipale.
Ce problème des viandes rouges, nous l’avons régulièrement soutenu dans nos colonnes, est une question de réseau, de cartel solidement implanté depuis des années, solidaire et hermétique.
Pour le combattre, il faut non pas des visites, mais bien la mise en place de toute une organisation.
Cela commence par l’application des lois et réglementation en vigueur. L’abattage des bêtes est interdit hors des abattoirs et sans contrôle vétérinaire préalable. C’est simple.
Mais ces obligations sont ignorées sur tout le territoire de la République. Et cela fait le jeu des spéculateurs qui ont pris en main ce secteur, l’ont cadenassé et solidement mis sous leur emprise.
Ils achètent comptant en masse, imposent le prix et personne n’y peut rien. Tout y passe. Sans aucun scrupule pour la sauvegarde du cheptel.
Les brebis sont les premières victimes. Elles coûtent moins cher. Restaurants et établissement de méchoui en servent généreusement à leur clientèle, contente de ce substitut payé à prix d’or.
Et personne ne réagit.
La réaction de ce qui a précédé est en fait une confirmation qui arrive un peu tard.
Le président de la Chambre nationale des bouchers, Ahmed Al-Amiri, a révélé que le prix moyen de l’agneau a atteint 62 dinars le kilogramme, tandis que celui du veau (bœuf) avoisine les 42 dinars le kilogramme.
Il a ajouté que les prix du bœuf connaîtront une hausse sans précédent avec l’arrivée du Ramadan, le prix au kilogramme devant atteindre 52 dinars au début du mois sacré.
Le président de la Chambre nationale des bouchers a confirmé que la situation se dégrade pour les professionnels, notamment en raison du phénomène persistant des commerçants sans licence qui achètent du bétail à bas prix aux éleveurs pour le revendre aux bouchers à des prix exorbitants.
Ceci précisé, que faudrait il faire ?
En assurant la prise en main des bouchers derrière lesquels se profile le… corps des spéculateurs qui tiennent le marché des viandes rouges, nous effectuerons la première et la plus importante des actions pour contrôler ce marché.
Commençons par régulariser l’établissement de ces boucheries qui ouvrent côte à côte un peu partout pour prendre en otage la ville, la cité, le quartier, tout en affichant les mêmes prix.
Comme si par miracle ils avaient tous les mêmes frais généraux. Limitons l’établissement des points d’ouverture en fonction des besoins des lieux, pour mettre un terme à l’anarchie actuelle.
Interdisons l’abattage des bêtes, dans ou devant l’établissement, sous peine de retrait immédiat et sans rémission de la patente et vérifions le contrôle sanitaire et vétérinaire.
Soumettons enfin ces boucherie qui gagnent un argent fou à l’obligation de délivrer une facture en bonne et due forme enregistrée et vérifiable.
Tout un programme qui ne risque pas de perturber le marché. Les viandes rouges constituent pour le moment un produit de luxe. Jusqu’à ce que l’on se décide de s’en occuper.
Cela ne saurait tarder. Le consommateur attend cette salutaire reprise en main qui ne peut venir que de ce nouveau corps constitué, qui possède ses réseaux et ses renseignements.
Kamel GHATTAS