Le gouvernement argentin a déposé plainte contre une société financière liée au président de la Fédération argentine de football (AFA), Claudio « Chiqui » Tapia, pour un vaste système présumé de blanchiment d’argent et de fraude fiscale.
Selon l’administration fiscale argentine (DGI), l’entreprise en question aurait facilité des opérations financières irrégulières atteignant 818 milliards de pesos (environ 566 millions de dollars) et éludé plus de 2,2 millions de dollars d’impôts sur les transactions financières depuis 2022.
L’enquête a révélé que la société, créée en 2022 sous le nom de Neblockchain, est devenue en quelques années un acteur central du financement des clubs de football argentins, grâce à sa proximité avec Chiqui Tapia et son influence au sein de la AFA.
Selon la DGI, la société aurait utilisé son portefeuille numérique et ses paiements par QR pour canaliser des montants massifs, en majeure partie incompatibles avec la capacité économique déclarée des utilisateurs.
Environ 31 % des mouvements provenaient d’entités non enregistrées, dont 9 % directement identifiées comme émettrices de factures frauduleuses, et 27 % de travailleurs indépendants à très faibles revenus, incapables de justifier des transferts qui dépassent parfois plusieurs milliards de pesos.
Les enquêteurs évoquent une véritable « armée de petits soldats », utilisés pour déplacer les fonds. Dans un cas cité, un travailleur indépendant, sans patrimoine significatif, aurait reçu plus de 230 millions de pesos et effectué des transactions totalisant 87 milliards de pesos via le portefeuille numérique.
D’autres utilisateurs, sans activités déclarées, auraient transféré plus d’un milliard de pesos chacun.
Ce système financier parallèle, selon les autorités, aurait été mis en place pour blanchir de l’argent issu du marché noir et de réseaux frauduleux, malgré une interdiction de la Banque centrale interdisant aux prestataires de services de paiement de travailler avec des contribuables considérés comme « non fiables ».
Le scandale éclabousse directement l’AFA puisque la société mise en cause est sponsor de plusieurs clubs de la première ligue.
La société a également accordé des prêts conséquents au club San Lorenzo, aujourd’hui sous enquête pour sa gestion frauduleuse.
Les liens personnels entre le propriétaire de la société et Tapia, largement exposés sur les réseaux sociaux, alimentent les soupçons d’un système intégré mêlant finances opaques et influence au sein du football professionnel.
Cette affaire survient alors que l’AFA traverse déjà une crise institutionnelle, Tapia et son bras droit Pablo Toviggino étant accusés d’ingérences arbitrales et de favoritisme envers des clubs liés à leur cercle proche.
Les révélations financières aggravent désormais les tensions, transformant un scandale sportif en véritable affaire d’État.
La DGI demande des mesures urgentes, allant de perquisitions aux saisies, en passant par le gel des avoirs et l’intervention de l’Unité d’information financière (UIF). L’enquête pénale vise également plusieurs sociétés satellites qui auraient servi à dissimuler des biens, parmi lesquels une flotte de voitures de luxe.
Le dossier représente l’une des affaires de fraude fiscale et de blanchiment les plus importantes touchant le secteur sportif argentin depuis des décennies. Les prochaines décisions judiciaires pourraient avoir de fortes répercussions sur la gouvernance de l’AFA et sur la position de Chiqui Tapia, déjà affaibli politiquement.