gradient blue
gradient blue
A la une Actualités

Kaïs Saïed : « La souveraineté comme ligne de front »

  • 1 décembre 17:30
  • 5 min de lecture
Kaïs Saïed : « La souveraineté comme ligne de front »

Le Président réaffirme la primauté de la souveraineté nationale et le refus de toute ingérence. La Tunisie décide seule de ses choix politiques et diplomatiques.

La Presse — Fidèle à ses convictions depuis son élection à la présidence de la République, Kaïs Saïed a toujours réaffirmé ses positions auprès des partenaires internationaux. La souveraineté nationale demeure au centre de son action et constitue l’un des axes principaux de sa politique. 

Ainsi a-t-il tenu, en recevant le ministre tunisien des Affaires étrangères, Mohamed Ali Nafti, au Palais de Carthage, à rappeler ce qu’il considère comme la pierre angulaire de l’État tunisien : « Nous sommes souverains et nous n’hésiterons jamais à exprimer à cor et à cri nos positions ».

Pour le Chef de l’État, la Tunisie demeure un pays indépendant, maître de ses décisions, et aucune pression extérieure ne saurait infléchir ses orientations politiques ou institutionnelles. Ce n’est pas là un positionnement nouveau, mais il se fait aujourd’hui plus ferme, plus direct et surtout plus explicite.

Pour le locataire de Carthage, les tentatives d’ingérence dans les affaires intérieures ne relèvent pas seulement d’un manque de respect des usages diplomatiques, mais elles constituent un retour à une logique colonialiste que la Tunisie refuse catégoriquement. Le message est clair et la souveraineté nationale n’est pas à discuter, ni à négocier.

Un rappel à l’ordre

Auparavant, et plus précisément, le 25 novembre, Kaïs Saïed a convoqué l’ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie, Giuseppe Perrone. Dans le communiqué officiel de la Présidence, la rencontre visait à exprimer « une vive protestation » contre ce qui est perçu comme une violation du cadre diplomatique, en référence à certaines activités menées « en dehors des canaux officiels ».

Dans cette même logique, et sur instructions du Président de la République, le ministre des Affaires étrangères a également convoqué l’ambassadrice des Pays-Bas, Joséphine Frantzen, pour lui notifier une protestation officielle au sujet d’actes considérés comme contraires aux usages diplomatiques.

À travers ces protestations successives, la Présidence entend rappeler que le dialogue entre États doit passer par les cadres institutionnels, et non par des démarches unilatérales susceptibles d’être interprétées comme un contournement des autorités légitimes.

Dans son discours, Kaïs Saïed s’est également attaqué au cœur du leitmotiv européen, à savoir la défense des droits humains. Un thème souvent mobilisé par les institutions européennes pour évaluer, critiquer ou « accompagner » l’évolution politique des pays partenaires.

Pour le Chef de l’Etat, cette rhétorique se heurte à une contradiction majeure qui traduit un double langage, mêlant exhortations morales et pratiques sélectives selon les intérêts stratégiques de l’UE.

Les Européens adoptent une attitude de « donneurs de leçons », se plaçant en arbitres de la démocratie et des droits humains, alors même que nombreux sont les exemples où les principes affichés s’inclinent devant les réalités géopolitiques ou économiques.

Tunis ne se considère plus comme un simple récepteur de recommandations européennes, mais comme un acteur souverain capable de défendre sa propre vision du droit et de la démocratie. « Les Européens ont beaucoup à apprendre de la Tunisie en matière de droits et de libertés », souligne par ailleurs le Président Kaïs Saïed.

Entre continuité historique et nouvelle doctrine diplomatique

La souveraineté, concept jadis mobilisé dans un cadre symbolique ou cérémonial, est, désormais, au centre de la doctrine diplomatique tunisienne. Le Chef de l’État établit un lien direct entre la défense de la souveraineté, les résistances historiques au colonialisme, et la nécessité de préserver l’unité politique face aux « agendas étrangers ».

En rappelant que la Tunisie « n’est ni une ferme ni un verger » et que « ceux qui complotent se trompent d’adresse », Kaïs Saïed se positionne comme le garant de la continuité historique d’un pays qui a toujours lutté pour son autonomie et son indépendance.

Son discours opère une rupture avec une longue tradition de coopération asymétrique où l’Union européenne jouait un rôle de « partenaire prescripteur ». Tunis privilégie une relation fondée sur le respect strict des prérogatives souveraines, l’égalité entre partenaires et la prise en compte des réalités nationales.

À travers ses déclarations, Kaïs Saïed pose clairement les jalons d’une doctrine de souveraineté renforcée, où la Tunisie revendique son droit de décider seule de ses orientations politiques et institutionnelles. Il cherche à réaffirmer la place de la Tunisie comme acteur autonome, refusant toute tutelle ou pression extérieure.

Cette ligne politique ouvre un nouveau chapitre dans les relations entre Tunis et Bruxelles. Un chapitre où la diplomatie tunisienne entend imposer ses propres termes, en exigeant des partenaires européens un respect total des règles diplomatiques, de la souveraineté nationale et de l’équilibre entre États.

Auteur

Samir DRIDI