Kairouan – Développement : Doter Kairouan des infrastructures qu’elle mérite
Kairouan semble avoir entamé sa métamorphose. Les investissements arrivent, les projets se multiplient. La récente annonce d’extension de « Yura Corporation » en est l’illustration.
Pourtant, la région reste pénalisée par une réalité que tout le monde connaît mais que trop peu de responsables osent affronter : Kairouan n’a pas les infrastructures qu’elle mérite.
Faut-il encore répéter cette évidence ?
La Presse — Kairouan ne manque ni de ressources humaines, ni de volonté, ni de potentiel. Ce qui lui manque, ce sont des routes sûres, un environnement propre, un urbanisme cohérent et des zones industrielles à la hauteur des ambitions que l’on affiche partout dans les communiqués officiels.
Les investisseurs ont leurs exigences
A Kairouan, les zones industrielles sont difficiles d’accès, les camions roulent sur des routes qui se fissurent sous leurs roues, les raccordements aux réseaux essentiels tardent, l’administration est très lourde. Comment peut-on attirer durablement des entreprises internationales dans ces conditions ?
Plusieurs investisseurs déjà installés à Kairouan, qui ont même lancé des extensions de leurs activités, saluent la qualité de la main-d’œuvre locale et le potentiel de la région ; mais ils reconnaissent aussi que la pérennité de ces expansions dépendra d’une amélioration réelle des infrastructures et des services essentiels à la compétitivité.
Les investisseurs ne cherchent pas des discours. Ils cherchent de la fiabilité, de la prévisibilité, de la cohérence. Tant que Kairouan n’aura pas une infrastructure digne de ce nom, elle restera un pari risqué là où des régions mieux équipées comme Sousse ou Sfax déroulent le tapis rouge aux industriels et commerçants du monde entier, qu’ils soient locaux ou étrangers.
L’environnement urbain, un argument économique
On a trop longtemps fait croire que les investisseurs se contentaient de main-d’œuvre. Cette vision datée est un piège. Les entreprises qui s’installent ici envoient des cadres, recrutent des techniciens, attirent des spécialistes. Ces gens veulent une ville vivable : des voiries entretenues, de la sécurité, un minimum de transport public, des espaces où leurs enfants peuvent jouer. Regardons la réalité en face : si la ville n’est pas attractive, les talents ne viennent pas et les investisseurs également.
L’impératif de moderniser les zones industrielles
Trop souvent, on célèbre l’octroi d’un terrain comme si c’était la fin du travail. Mais ce n’est que le début. Les entreprises ont besoin de fibre optique fiable, réseaux d’assainissement opérationnels, gestion moderne des déchets, énergie stable et de transport collectif pour leurs employés. Ce n’est point un luxe, c’est un standard mondial.
On ne peut pas espérer attirer et retenir des groupes internationaux tout en laissant une ville stagner dans des conditions d’un autre temps. On ne peut pas parler d’« économie », de « développement régional », de « justice territoriale » si les fondamentaux, comme les routes, eau, assainissement, urbanisme, environnement…, ne sont pas bien assurés.
Kairouan ne demande pas des promesses, mais des actes. Elle ne demande pas un miracle, mais une stratégie. Elle ne demande pas d’être « visitable » une fois par an lors des célébrations religieuses, mais habitable, et surtout investissable : à fort potentiel. La région a tout pour devenir un pôle économique majeur.
Elle se trouve au centre du pays, elle dispose d’une main-d’œuvre jeune, elle attire des industriels de plus en plus exigeants. Il est temps que les décideurs, locaux comme nationaux, comprennent enfin qu’on ne développe pas une ville avec des symboles. On la développe avec du béton, des réseaux, des investissements publics, et de la volonté politique.