Kairouan : une centrale solaire de 100 MW alimentera 43 000 foyers et réduira les importations de gaz
La Tunisie inaugure sa première centrale solaire photovoltaïque de 100 mégawatts à Metbassta-Sbikha dans le gouvernorat de Kairouan, projet phare d’un programme national visant 500 mégawatts d’énergies renouvelables et marquant le lancement effectif du système de concessions dans le secteur énergétique tunisien.
La ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie, Fatma Thabet Chiboub, a inauguré mardi la centrale solaire de Metbassta-Sbikha, développée par l’investisseur émirati Amea Power pour un montant de 250 millions de dinars. L’installation, qui s’étend sur 200 hectares et comprend 221 000 panneaux solaires, fournira de l’électricité à environ 43 000 foyers tunisiens et réduira les émissions de carbone de 117 000 tonnes métriques annuellement.
Le projet permettra de diminuer les importations de gaz naturel d’environ 22 millions de dollars par an, soit 2,3 % des quantités importées, et représente 0,5 % de la consommation nationale d’énergie primaire pour 2024. La STEG réalisera des économies de combustibles estimées à 15 millions de dollars annuellement. Dès son entrée en production, l’installation devrait permettre de réduire d’environ 50 millions de dinars les coûts de production d’électricité qui dépendent des combustibles conventionnels.
L’initiative s’inscrit dans le cadre du premier appel d’offres pour le système de concessions, attribué en décembre 2019 et ratifié par le décret numéro 19 du 22 décembre 2021. Elle constitue la première phase d’un programme global comprenant cinq projets totalisant près de 500 mégawatts répartis sur cinq gouvernorats. Le financement a été assuré par des institutions financières internationales relevant du Groupe de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement, cette dernière contribuant à hauteur de 73 millions de dinars.
Fatma Thabet Chiboub a souligné les dimensions stratégiques, économiques et environnementales du programme. Sur le plan stratégique, il vise à réduire le déficit énergétique et à sécuriser l’approvisionnement du pays. Économiquement, ces installations diminueront le coût de production électrique, soutenant les efforts de réduction des subventions et l’amélioration de la situation financière de la STEG. Le projet génère 40 emplois permanents et contribue au développement régional. La ministre a qualifié ce projet de première expérience ayant permis d’établir les bases d’un partenariat réussi entre les différentes administrations pour l’obtention des autorisations nécessaires, expérience qui servira de référence pour les projets futurs en permettant de réduire les délais de réalisation.
Les travaux, réalisés sur 18 mois, ont mobilisé plus de 800 personnes, dont plus de la moitié originaires du gouvernorat de Kairouan et ayant bénéficié de formations en installation et maintenance photovoltaïque. Selon Hussain Al Nowais, président du conseil d’administration d’Amea Power, 60 % des employés proviennent des villages avoisinants, et des entreprises tunisiennes ont participé comme sous-traitants, acquérant ainsi une expérience dans la construction de centrales d’énergies renouvelables.
Maline Blomberg, directrice générale adjointe pour l’Afrique du Nord de la Banque africaine de développement, a qualifié cette initiative d’emblématique, résultant d’une vision partagée entre les autorités publiques, le secteur privé et les partenaires financiers, visant à fournir une électricité abordable aux citoyens. Elle a affirmé que la BAD continuera d’appuyer la Tunisie dans le développement d’infrastructures résilientes ainsi que dans un développement inclusif et régional pour le pays.
Faycel Trifa, PDG de la STEG, a qualifié le projet de stratégique national, s’inscrivant dans la politique publique d’accélération de la transition énergétique. La STEG a joué son rôle de partenaire public en fournissant l’assistance technique nécessaire et en garantissant le raccordement au réseau national, assurant ainsi la sécurité et la stabilité du système électrique.
Le projet s’intègre dans le Plan stratégique national de maîtrise de l’énergie 2035, visant à réduire la demande énergétique de 37 % et à atteindre 50 % de production électrique issue de sources renouvelables.
Hussain Al Nowais, président du conseil d’administration d’Amea Power, a affirmé que cette centrale représente le plus grand projet d’énergie solaire développé et réalisé entièrement en Tunisie à ce jour. Amea Power, active dans plus de vingt pays, a récemment étendu ses opérations en Asie centrale, notamment en Ouzbékistan, au Kazakhstan et en Azerbaïdjan, avec des projets d’éolien, de solaire et de stockage d’énergie. En Égypte, la société a construit la centrale solaire de Benban à Assouan, d’une capacité de 500 mégawatts avec batteries de stockage de 300 mégawatts, actuellement en expansion avec 1 000 mégawatts supplémentaires achevés en mai 2024. Elle a également réalisé le parc éolien de Ras Ghareb de 500 mégawatts, en cours d’extension de 1 000 mégawatts, portant son portefeuille égyptien à 2 500 mégawatts.
Pour répondre aux défis de pénurie d’eau en Afrique, Amea Power s’est alliée à la société Cox pour développer des stations de dessalement au Togo et en Angola, avec des projets également envisagés en Tunisie. Al Nowais a déclaré que la Tunisie occupe une place spéciale dans les cœurs de l’entreprise, exprimant l’ambition d’accroître sa présence dans le pays avec de nouveaux investissements.