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Culture

«Stories» de Abou baker chawki : Sous le même toit, sous le même ciel

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  • 21 décembre 19:45
  • 3 min de lecture
«Stories» de Abou baker chawki : Sous le même toit, sous le même ciel

Dans l’espace exigu d’un appartement du Caire, une famille traverse l’histoire de l’Egypte, des années 60 à l’ère Moubarak, entre rêves, désillusions et résistance du quotidien.

La Presse — Raconter l’Egypte depuis les années 60 jusqu’à l’ère de Moubarak à travers l’histoire d’une famille ordinaire mais tellement particulière par ses personnages, ses histoires, ses trajectoires : tel est le pari du film.

Tout se joue dans l’espace exigu d’un appartement cairote, où les trois films partagent un lit à deux places, où l’on se tasse devant la télévision pour suivre les matchs de l’équipe préférée.

La télé, placée au centre du foyer et de l’action, reste le background permanent de ce qui se passe : l’écho du politique, de la rue, de la guerre et du football.

Dans cet appartement, on apprend le russe, on rêve de victoire et de gloire en tant que footballeur, on tisse les débuts d’une histoire d’amour par correspondance et on joue du piano sous les protestations de voisins grincheux mais profondément attachants.

Ça bouge, ça grouille, ça s’agite dans tous les sens, mais le récit avance à coups de rêves et de déceptions, dans une chorégraphie du quotidien finement observée.

La peur, la dictature, l’art, la guerre, le patriotisme, le nationalisme: tout traverse le film sans jamais l’alourdir. Le Caire, ses rues, les médias, la télévision, la politique et le foot composent une matière vivante.

Abdel Nasser, Sadate, puis Moubarak. La ville change, le pays se transforme, et la famille perd les siens, se retrouve à enterrer ses morts.

Un tableau âpre aux couleurs ternes, mais paradoxalement chaleureux, à l’image de ce peuple égyptien qui parvient à tenir debout en toutes circonstances.

Abou Bakr Shawky filme ses personnages avec un amour évident. Il les raconte et les dépeint avec tendresse, depuis le regard de celui qui a quitté le bercail.

Son personnage, parti en Autriche pour retrouver son amoureuse et vivre pleinement sa passion pour le piano, finit par rebrousser chemin et construire son nid.

Elisabeth, catalyseur discret au sein d’une famille structurée autour de la figure maternelle, magnifiquement incarnée par Nelly Karim, trouve sa place dans ce brouhaha de tendresse.

Le film dit aussi quelque chose de la transmission et de l’écriture. Ces histoires rédigées en cachette, la nuit, quand tout le monde dort, comme si le fait d’écrire défiait un sort annonciateur de malheur.

Sous le lit, des carnets écrits par la mère. L’histoire familiale devient un roman, puis un film. Et, aux JCC, un moment de cinéma profondément humain, délicat et habité.

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Auteur

Asma DRISSI