« Rêve(s) » : comédie noire au Rio : Au cœur des ruines et des illusions
Du 26 au 28 décembre, Rêve(s), une comédie noire tunisienne signée Jalila Baccar et Fadhel Jaïbi, offre un spectacle dense et troublant, où le rire se frotte à la violence du réel, et où les rêves individuels se heurtent aux fantômes d’un pays et d’une histoire jamais refermée.
La Presse — Dans un vieux bâtiment délabré de Tunis, vestige colonial rongé par le temps et la végétation, le Palace – El Mauro se dresse comme un personnage à part entière.
Lieu de mémoire et de fissures, il abrite une galerie de figures marginales, à la fois drôles et tragiques, réunies dans une cohabitation fragile et explosive.
Rêve(s) met en scène une vieille comédienne résistante, une infirmière amère, un concierge cynique, un jeune autiste passionné de théâtre, une journaliste rebelle, un égoutier dit « fou »… Autant de vies cabossées qui se croisent dans cet immeuble hanté par les fantômes du passé.
Mais l’équilibre précaire bascule brutalement lorsqu’un cadavre est découvert.
La descente de police qui s’ensuit agit comme un révélateur : secrets enfouis, violences sourdes et fractures intimes remontent à la surface, entraînant le spectateur dans une plongée vertigineuse au cœur de l’âme humaine, entre espoir, folie, rêves brisés et désillusion.
Écrite par Jalila Baccar, avec une dramaturgie élaborée aux côtés de Fadhel Jaïbi, la pièce s’inscrit dans une veine de comédie noire où le rire devient arme critique.
La mise en scène, la scénographie et les lumières, signées Fadhel Jaïbi, sculptent un univers à la fois réaliste et spectral, soutenu par une création sonore de Waddhah El Ouni.
Portée par une distribution solide – Jalila Baccar, Jamel Madani, Mohamed Châabane, Mounir Khazri et Meriem Ben Hamida – Rêve(s) s’affirme comme un spectacle choral puissant.
Avec Rêve(s), le Rio propose une expérience théâtrale intense, où le théâtre devient miroir cruel et poétique d’une société en tension, oscillant entre lucidité et désir obstiné de croire encore aux rêves.
