La Presse — Que retenir de l’année cinématographique 2025 ? Une année marquée par certains succès retentissants de films comme « La voix de Hind Rajab » de Kaouther Ben Henia, plusieurs fois primés dans les festivals internationaux dont la Mostra de Venise où il a obtenu le Lion d’argent et qui a changé le regard des occidentaux sur le génocide perpétré à Gaza.
« Promis le ciel » d’Erige Shiri, Etoile d’or du Festival international de Marrakech, « Où le vent nous emmène-t-il ? » d’Amel Guellati, prix du meilleur film arabe au Festival international d’El Gouna et « Round 13 » sacré meilleur film au Festival international du film Fajr en Iran. Au niveau commercial, les films, productions privées sans l’aide de l’Etat : « Sahbek Rajel 2 », « Start up » et « Paarasol » de Heifel Ben Youssef, « Jad » de Jamil Najjar et « The Devil’s seed » de Mohamed Khalil Bahri ont rempli les salles à des niveaux différents.
Tous ces succès soulignent le rayonnement du cinéma tunisien à l’échelle internationale et comptent parmi les meilleurs. Malgré les difficultés que traverse le secteur, les cinéastes réussissent à relever le défi en essayant de se surpasser à chaque fois par le choix de thématiques en rapport avec l’actualité et les préoccupations majeures des gens mais aussi des traitements esthétiques qui se distinguent par leur singularité. Il y a donc un bouillonnement artistique sans précédent notamment de la part des cinéastes femmes dont l’apport est remarquable.
Cette effervescence n’est pas un hasard. C’est le fruit d’au moins deux facteurs clés : la sensibilité, l’audace et le sérieux de ces cinéastes qui disposent d’une vision particulière et d’une approche cinématographique qui se caractérisent par la recherche de formes inhabituelles dans le traitement des sujets. L’autre facteur consiste au coup de pouce salvateur du ministère de la Culture à travers la Commission d’aide à la production sans laquelle plusieurs ne seront pas produits.
Cet appui est le point de départ pour un cinéaste dont le producteur doit courir les Fonds d’aides internationaux pour compléter le financement du film.
Sur le plan législatif, l’adoption par l’Assemblée des représentants du peuple d’une exonération fiscale. Même si elle est controversée par certains, elle porte sur la modification du régime fiscal applicable aux équipements et matériels utilisés dans le domaine du cinéma et de l’audiovisuel. Le taux fiscal est de 7% destiné à la production cinématographique, audiovisuelle et photographique au profit des entreprises et institutions légalement déclarées.
L’Assemblée approuve la création d’un Fonds d’encouragement à l’investissement cinématographique et audiovisuel (art. 61 amendé). Ce Fonds prévoit le financement de studios de tournage modernes et de laboratoires numériques spécialisés visant à attirer les productions étrangères en Tunisie.
Les flops concernent certains films qui n’ont pas fonctionné ni à leur sortie en salles, ni à être sélectionnés dans les festivals : « Backstage » de Afef Ben Mahmoud et Khalil Benkirane, « Silentium » de Nidhal Chatta, « Wed » de Habib Mestiri et « Barzakh » de Kais Mejri. Au milieu de ces fictions, les documentaires n’ont pas de place dans les salles. Ils restent en marge de la distribution et de l’exploitation. Pourtant, ils bénéficient d’encouragements financiers de la part de la Commission d’aide du ministère de la Culture. Leur présence dans les festivals reste négligeable.
A propos de festivals, cette année n’a pas été la meilleure pour certains.
A commencer par le Festival international des cinéastes amateurs de Kélibia (Fifak). Il a frôlé la catastrophe et a failli ne pas se tenir sans l’intervention de dernière minute du ministère de la Culture, des membres de la Ftca et le soutien de quelques médias. D’autres petits festivals à l’instar de celui du Sahara de Ksar Ghilène, de la femme à Nabeul organisé par la Ftcc ont su tirer leur épingle du jeu.
Pour terminer, les Journées cinématographiques de Carthage dont la 36e édition restera dans les annales. Une édition sans reproches au niveau de la sélection des films et de l’organisation sauf ce cheveu dans la soupe qui s’est introduit dans la cérémonie de clôture : l’empêchement du jury de monter sur scène présenter les prix et ses motivations. Un antécédent fâcheux qui a créé une polémique dont on pouvait largement se passer et terminer l’année en beauté.