Pendant plus de 70’, l’équipe de Tunisie a joué la peur au ventre pour s’effondrer. Quand elle a cru en ses chances et s’est relâchée, elle était proche de grignoter un point. Dommage !
La Presse — Si le match avait fini 3-3-, ça aurait été un hold-up, un superbe retournement de situation. A 3-0, le but de Lookman marqué à la 68’, qui aurait cru à cette fin de match ? Pas beaucoup, sauf ceux qui connaissent le Nigeria, une équipe très forte en milieu et surtout en attaque, mais naïve en défense depuis des années. Les Nigérians, maîtres absolus du match, ont pensé gagner et plier le match très tôt.
Ça a aidé Mejbri surtout à se réveiller et à prendre ses responsabilités pour bouger plus, casser les intervalles et aux autres joueurs de lâcher cette inexplicable peur pour jouer décontractés. Résultat : une équipe de Tunisie qui s’éclate, qui met la pression, qui trouve en Tounekti le providentiel ailier de débordement qui sait tout faire, et qui marque un but, puis un deuxième et rate lamentablement le facile but de l’égalisation par Sassi.
C’était fou, mais aussi frustrant. Comment expliquer cette « schizophrénie » dans le jeu tunisien ? D’abord, ce relâchement nigérian avec une défense qui a soudain fléchi, puis ce sursaut d’orgueil et cette réaction des cadres. Et la raison la plus plausible à ce retour fort reste l’abandon d’un football de peur, pour un autre d’initiative et de jeu sans calculs.
Qu’est-ce qui a alors poussé Sami Trabelsi à changer son système et ses équilibres de défense ( défense plate à 4) pour un 3-5-2 incohérent et facile à percer sur le couloir gauche ? Ce n’était pas le 5-4-1 face au Brésil avec Meriah comme libéro, mais une défense à trois et Ben Romdhane ( pas à l’aise sur son pied droit sur le couloir droit) et Abdi, abandonnés par Mejbri et Sassi censés les couvrir et resserrer les intervalles devant un Lookman qui se baladait à son aise.
C’était raté : toute accélération et tout centre vertical sur le côté de Abdi amenait le danger, et ce ne sont pas trois défenseurs axiaux qui ont empêché Osimhen de voler seul et de gagner les duels aériens. On était abassourdi, trop méfiant et sans le moindre cran pour gagner un duel ou créer le danger. Le Nigeria était fort, mais ses joueurs étaient confiants et peut-être surpris de voir notre équipe les surestimer de cette façon.
Fallait-il trois buts et un effondrement pareil pour laisser sa peur et jouer son football ? Les choix de Sami Trabelsi étaient-ils bien réfléchis ? Que faisaient Dahmen, Talbi, Ben Romdhane, Bronn, Sassi, Mejbri pendant plus d’une heure ?
Tant de questions auxquelles Trabelsi n’a pas répondu dans sa conférence de presse. Plus que le changement du plan de jeu, c’est cette hantise défensive collective qui se voyait pour plus d’une heure, qui nous agace.
C’est ce qu’on stigmatise fortement. Quand vous avez des joueurs comme Tounekti, Saâd, Achouri ou Mejbri, vous devez défendre vos chances, prendre l’initiative du jeu et ne pas subir et craindre trop un adversaire qui ne s’attendait pas à cela.
C’est bien de jour en zone, de défendre avec un bloc bas quand l’adversaire est technique, mais quand il n’y a pas de transitions, de contres, de moments forts pour piéger cet adversaire, ça devient un football de la peur.
De l’anxiété qui n’a pas de sens. Les 20’ de la fin contredisent Sami Trabelsi et son fatal conservatisme. Il n’a pas su choisir ni le plan ni les joueurs pour gagner. On pense que le nul était l’objectif maximum pour lui. Il l’a transmis aux joueurs pendant plus d’une heure. La suite, on la connaît.