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Economie

Africa Investment Forum 2025 : la BEI appelle à une nouvelle ère de financement structurant pour l’Afrique

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  • 27 novembre 12:22
  • 6 min de lecture
Africa Investment Forum 2025 : la BEI appelle à une nouvelle ère de financement structurant pour l’Afrique

Lors des Market Days 2025 de l’Africa Investment Forum (AIF), organisés par le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) et ses partenaires, la Banque Européenne d’Investissement (BEI) a réaffirmé sa stratégie “Africa First” et mis en lumière la nécessité de transformer les outils de financement pour accompagner le développement du continent. Organisés par le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) et ses partenaires, ces rendez-vous ont réuni investisseurs, institutions financières et porteurs de projets africains du 26 au 28 novembre à Rabat.

Un panel de haut niveau consacré aux mécanismes d’investissement et de finance climatique en Afrique, qui s’est tenu jeudi 27 novembre à Rabat, a dressé un diagnostic précis des défis et du potentiel des marchés africains dans les secteurs des infrastructures, des transitions énergétiques et du développement du secteur privé. Les discussions ont insisté sur l’importance d’une ingénierie financière adaptée aux réalités locales et de partenariats structurants avec les institutions africaines pour accélérer les investissements stratégiques.

L’Afrique au centre de la stratégie géopolitique et financière de la BEI

Andrew McDowell, directeur général de BEI Monde, a souligné la place centrale de l’Afrique dans la stratégie actuelle de l’institution, rappelant que le continent est devenu un marché prioritaire dans un contexte géopolitique où la compétition pour l’influence et les partenariats économiques s’intensifie. Cette priorité se traduit par une montée en puissance du lending souverain, le développement de nouveaux instruments dédiés au secteur privé, et l’innovation financière à travers les prêts en monnaie locale, les fonds de capital-risque et les facilités de blended finance. La BEI entend s’appuyer davantage sur les institutions financières africaines pour optimiser le déploiement du capital et améliorer la lisibilité des projets.

Prenant ensuite la parole, Brahim Benjelloun Touimi, administrateur directeur général délégué de Bank of Africa, a présenté les fondements de l’approche “Africa First”, conçue pour renforcer les capacités institutionnelles et la bancabilité des projets structurants. Cette stratégie repose sur l’ancrage local des projets avant leur syndication internationale, la libération des bilans des banques africaines grâce à des mécanismes de partage de risques et l’institutionnalisation du blended finance pour accélérer les projets d’impact. A cet effet, deux initiatives phares ont été mises en avant : un fonds de 20 millions d’euros dédié aux femmes entrepreneures et un green bond de 15 millions d’euros, première étape d’une stratégie plus large sur les marchés durables.

Renforcer les partenariats et la bancabilité

Lors de cet événement majeur, la BEI a également réaffirmé son engagement auprès de partenaires majeurs tels que la Banque africaine de développement et l’Africa Finance Corporation. Les collaborations visent à financer les infrastructures critiques, renforcer la résilience climatique et apporter l’assistance technique nécessaire pour structurer des projets complexes. Cette approche permet de conjuguer la puissance de bilan de la BEI avec l’expertise locale et sectorielle des institutions africaines.

Sur un autre plan, le panel a aussi mis en lumière un autre défi clé : les marchés obligataires africains pâtissent d’une perception du risque plus élevée que la réalité, selon la Global Emerging Market Database de la BEI. Cette divergence se traduit par un coût de financement élevé pour les États, une profondeur limitée des marchés obligataires et des difficultés d’accès aux capitaux internationaux. Les intervenants ont insisté sur la nécessité d’une meilleure harmonisation réglementaire, de la création de plateformes électroniques de trading, de maturités obligataires plus longues et d’une diversification des instruments financiers incluant les green bonds, sustainability bonds et SDG bonds.

A l’issue de ces discussions, tous les participants ont souligné que l’Afrique ne manque pas de projets mais que ceux-ci doivent être suffisamment lisibles et bancables pour séduire les investisseurs internationaux. Il est aussi essentiel de renforcer les études de pré-faisabilité et les évaluations d’impact, de structurer les projets selon des standards internationaux, de développer les compétences des promoteurs locaux et d’accroître les mécanismes de partage des risques.

Climat et finance : pour un sursaut collectif pour l’Afrique

Il est aussi à noter que la question climatique a été au centre du débat. Malgré 40 % du potentiel solaire mondial et d’importantes ressources éoliennes, l’Afrique ne reçoit que 2 à 3 % de la finance climatique mondiale. Dans ce cadre, la BEI a appelé à un sursaut collectif pour déployer massivement des financements concessionnels, mobiliser le secteur privé dans les énergies renouvelables et accélérer la décarbonation des systèmes énergétiques africains.

Les participants ont en outre identifié des priorités concrètes : intensifier les partenariats sur les infrastructures critiques, étendre les prêts en monnaie locale, amplifier l’initiative African Women In Business, optimiser les performances de la Boost Africa Technical Assistance Facility, renforcer le dialogue avec les agences de notation et publier davantage de données sur le crédit privé, tout en développant les capacités techniques des porteurs de projets et en accélérant les investissements verts.

Le consensus est donc clair : l’Afrique est à un moment charnière où l’ingénierie financière, un cadre réglementaire renforcé et l’innovation climatique peuvent transformer les trajectoires économiques nationales.

Et là les opportunités ne manquent pas : la BEI, la BAD, l’AFC et les banques africaines disposent des leviers pour catalyser une nouvelle génération de projets plus verts, inclusifs et structurants. La condition reste une coordination renforcée et un effort collectif pour réduire les perceptions de risque qui freinent encore l’accès aux marchés internationaux.

Il est aussi à noter que les Market Days 2025, qui se prolongent jusqu’au 28 novembre, constituent une plateforme stratégique pour réunir investisseurs et projets africains et favoriser la concrétisation d’investissements transformateurs dans les infrastructures, l’énergie, l’agroalimentaire, la digitalisation et l’industrie. Cette édition de l’Africa Investment Forum, qui se tient à Rabat, porte le thème : “Réduire les écarts : mobiliser le capital privé pour libérer tout le potentiel de l’Afrique”.

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Auteur

Meriem KHDIMALLAH