Le projet de l’impôt sur la fortune proposé par le ministère des finances comme solution pour plus d’équité et de justice sociale en matière de prélèvement d’impôts et afin de renflouer les caisses de l’Etat a suscité de nombreux remous depuis son annonce et son examen par les députés de l’ARP.
Il faut savoir que cette initiative, qui concerne les personnes ayant une fortune supérieure à trois millions de dinars prévoit un prélèvement annuel d’impôt de 0.5% sur les fortunes n’excédant pas trois millions de dinars et qui inclut les actifs, les biens mobiliers et immobilier, les actions dans les entreprises, et les titres fonciers ainsi qu’une imposition d’1% sur les fortunes égales et supérieures à cinq millions de dinars. L’impôt sur la fortune n’est pas une idée nouvelle.
Elle a déjà été débattue par le passé dans plusieurs pays arabes et européens, notamment en France où cette initiative a été accueillie très froidement par les principales catégories concernées qui y voient une manière de les pousser à s’installer ailleurs sous des cieux plus cléments en matière de fiscalité.
En Tunisie, l’initiative a été proposée sans avoir été accompagnée d’un réel débat sur son efficacité. Mais ce qui surprend surtout c’est le fait que ce projet de loi a été discuté à l’ARP sans qu’aucune donnée n’ait été présentée officiellement sur le nombre de personnes fortunées en Tunisie et sur la valeur exacte de leur fortune et de leur patrimoine.
Comment, en l’absence d’une cartographie fiscale détaillée sur les fortunes officielles et informelles, est-il possible, alors, d’évaluer l’efficacité ou la portée d’une telle réforme ?
Selon l’intervention d’un expert sur une radio privée, si l’impôt à la fortune venait à passer, le rendement de ce dernier serait insignifiant dès lors qu’il pourrait générer un montant inférieur à onze millions de dinars ce qui reste dérisoire face aux besoins de rééquilibrage des finances publiques, rendant le projet plus contre-productif que productif.
Pis, cet alourdissement de la charge fiscale risque de pousser les particuliers qui se sont enrichis de l’économie informelle à redoubler d’ingéniosité pour échapper au fisc et à accélérer la reconversion de leurs biens afin de contourner cette pression fiscale, ce qui ne ferait qu’encourager et amplifier le blanchiment d’argent. Pour les grands groupes fortunés déjà connus, il pourrait entraîner une baisse de leur contribution à l’épargne nationale et une régression de la redistribution des revenus via les circuits économiques formels.
Dans quelle mesure, alors, l’adoption ou non de cette mesure fiscale impactera les équilibres financiers?