Mes Humeurs : M’dhalla et chéchia
La Presse — Cet été particulièrement, la m’dhalla est dans l’esprit de la saison et… du temps. Ce chapeau de paille connaît un succès foudroyant, typiquement tunisien, il apparaît, l’été venu, et protège du soleil, un accessoire pratique donc. Il est porté principalement par les hommes dans la campagne, dans quelques régions comme à Djerba, les femmes aussi portent la m’dalla, mais elle est dans ce cas de forme conique.
Ces dernières années, par effet de mode, la m’dalla, sans doute aussi pour son prix (moins cher que les chapeaux), s’est généralisée, elle est portée partout, en ville, à la plage, le matin et l’après-midi, elle a changé d’identité et de fréquentation, d’utile elle s’est transformée en objet de mode urbaine populaire.
Elle s’impose dans la rue, s’expose par terre et séduit aussi bien le pauvre que le nanti, l’homme ordinaire que le jeune extravagant.
Chaque pays se flatte de son couvre-chef, on connaît le béret basque, le chapeau sous ses différentes formes, le melon et le haut de forme qui caractérisent les têtes anglaises, le boléro espagnol, le borsalino italien, les bobs, les casquettes, etc. Les couvre-chefs les plus connus, qui caractérisent le Tunisien et les plus portés sont la m’dhalla en été et la chéchia en hiver.
Dans un ouvrage délicieux (Un candide à sa fenêtre; éd. Gallimard), Régis Debray consacre un chapitre sur les couvre-chefs des chefs, il décrit les coiffes du général de Gaulle. Celui-ci a porté selon son statut successivement le shako à casoar blanc du Saint-Cyrien, puis le calot du capitaine, le képi à galons du commandant, la soupière en cuir ajouré du colonel de tanks, le képi à deux étoiles du général de brigade, le large béret noir du croiseur, le casque de liège colonial, etc, si l’on évacue, ajoute Debré, la casquette, le canotier et le feutre mou, attributs plébéiens, ne manquent à l’appel que le melon, le huit reflets et le bicorne.
Le mouvement du port du couvre-chef s’est manifesté en Tunisie dans les années 2000, la casquette, suivie du bob, le chapeau s’est installé, aujourd’hui, le citoyen porte toutes les coiffes sans complexe. M’est souvenir que mon ami, le regretté Bady Ben Naceur (journaliste et critique d’art à La Presse) lors d’un vernissage d’une exposition au musée de la ville de Tunis, de feu Abderrazak Sahli, portait un chapeau Fedora classique noir, il était le seul à porter un chapeau dans la foule des visiteurs, pourtant sapés pour la circonstance, le couvre-chef était rare, sinon introuvable sur une autre tête.
Les uns félicitaient Bady pour le choix du chapeau, les autres le regardaient comme une bête de cirque, d’autres encore riaient sous cape. Aujourd’hui, partout à Tunis ou ailleurs, le chapeau, la m’dalla ou la chéchia ne font plus tourner la tête des passants.