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Milieu scolaire : Des élèves en manque de soutien psychologique et d’encadrement moral

  • 21 octobre 17:50
  • 5 min de lecture
Milieu scolaire : Des élèves en manque de soutien psychologique et d’encadrement moral

Les workshops scientifiques autour de la psychanalyse avec l’enfant confirment la nécessité de recruter un pédopsychiatre ou un médecin généraliste dans chaque école tunisienne, où l’écoute de l’élève n’existe pas. Des postes souvent non occupés, qui peuvent être comblés par le recrutement de professionnels de santé pour améliorer la qualité du travail pédagogique et psychologique en milieu scolaire.

La Presse —Alors que l’école tunisienne est souvent perçue comme un pilier de l’ascenseur social, un fossé grandissant se creuse entre les impératifs de la réussite académique et le bien-être émotionnel et moral des élèves. Le manque criant de soutien psychologique et d’encadrement moral au sein des établissements scolaires représente un véritable «angle mort» du système éducatif, impactant directement les performances, le climat scolaire et la santé mentale d’une jeunesse déjà confrontée à de multiples défis sociaux.

Constats préoccupants

Quand l’école devient un lieu de frustration, les élèves ne sont pas placés dans les meilleures conditions de réussite. Le système éducatif tunisien est confronté à des taux d’abandon scolaire élevés, avec des chiffres atteignant environ 100.000 élèves par an. Si les facteurs socioéconomiques jouent un rôle, la détérioration du climat scolaire est également pointée du doigt. De nombreux jeunes interrogés dans diverses études se disent «frustrés» et «non épanouis» au sein de leurs institutions. 

Ce mal-être se traduit par une prévalence accrue de phénomènes à risque. La violence en milieu scolaire, la consommation de stupéfiants, l’extrémisme idéologique, l’émigration clandestine et, dans les cas les plus graves, le suicide chez les jeunes, sont des réalités qui s’accentuent et qui témoignent d’une détresse psychologique profonde et mal prise en charge.

Une étude sur les lycéens et étudiants consultant en psychopédagogie revèle que les consultations sont relatives généralement aux troubles d’adaptation, soulignant le besoin d’un accompagnement préventif et continu.

Le rôle d’encadrement, souvent reporté sur des enseignants déjà surchargés, est loin de suffire. Le ratio entre le nombre de psychologues ou conseillers d’orientation et le nombre d’élèves est notoirement insuffisant, rendant le soutien spécialisé accessible uniquement à une minorité.

Les racines du problème

Le manque de ressources et des priorités inversées ont conduit à cet état de fait. Le déficit d’encadrement moral et psychologique s’explique par plusieurs facteurs structurels, le sous-effectif chronique en personnel spécialisé en premier lieu. Les établissements scolaires manquent cruellement de psychologues, de conseillers d’orientation et d’assistants sociaux.

Les efforts de recrutement et de concours pour ces postes ne parviennent pas à combler le fossé. Le système éducatif reste focalisé sur la performance scolaire et l’accumulation des connaissances, reléguant le développement socio-émotionnel et le bien-être mental au second plan. 

La consultation psychologique demeure stigmatisée dans la société, ce qui freine la demande d’aide de la part des élèves et, parfois, des familles. Ce qui crée un sentiment de stigmatisation. Une formation insuffisante du personnel est souvent constatée.

Les enseignants et le personnel administratif sont rarement formés aux premiers secours psychologiques ou à la gestion des élèves en détresse, limitant leur capacité à créer un climat scolaire véritablement positif et sécurisant.

Remédier à la situation

Des pistes de solution intégrées existent. Pour inverser cette tendance et garantir le droit des élèves à une santé mentale saine, des actions coordonnées s’imposent, à savoir : 

– Renforcer les ressources humaines spécialisées par le recrutement massif et le redéploiement. Il s’agit d’augmenter significativement le nombre de psychologues scolaires et d’assistants sociaux pour garantir leur présence permanente dans chaque établissement (primaire, préparatoire, secondaire). 

– Créer des unités d’appui. Le dépôt récent d’une proposition de loi visant la création d’unités d’appui à la santé mentale en milieu scolaire est un pas encourageant, qui doit être soutenu et financé par l’État pour assurer des services confidentiels et anonymes. 

– Intégrer formellement l’apprentissage socio-émotionnel (ASE) dans le programme scolaire. Cela inclut la formation aux aptitudes sociales, à la gestion du stress, à l’esprit critique et à la résolution de conflits. 

– Fournir une formation initiale et continue obligatoire à tout le personnel éducatif sur les signes de détresse psychologique, les premiers secours psychologiques, et la création d’un environnement bienveillant. 

– Lutter contre la stigmatisation en menant des campagnes nationales de sensibilisation ciblées sur les élèves, les parents et le personnel pour normaliser la demande d’aide psychologique et briser le tabou de la maladie mentale. 

– Exploiter les réseaux intersectoriels en mettant en place des systèmes d’orientation clairs entre les écoles et les structures de santé mentale publiques et communautaires pour assurer une prise en charge spécialisée rapide et efficace.

Le défi est immense, mais la jeunesse tunisienne est l’avenir du pays. L’investissement dans le soutien psychologique et moral des élèves n’est pas un luxe, mais une condition fondamentale pour bâtir une société résiliente, épanouie et capable de relever les défis de demain. L’école doit redevenir, avant tout, un lieu de développement intégral.

Auteur

La Presse