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La Tunisie vit au-dessus de ses moyens selon Fitch Solutions : comment en sortir ?

  • 6 novembre 11:17
  • 3 min de lecture
La Tunisie vit au-dessus de ses moyens selon Fitch Solutions : comment en sortir ?

Une étude publiée par l’agence britannique Fitch Solutions le 22 octobre 2025 souligne une nette érosion du pouvoir d’achat des ménages tunisiens depuis 2019, révélant un déséquilibre accru entre consommation et croissance économique.

Selon le rapport intitulé “Consumption and Household Income in Tunisia”, le pouvoir d’achat réel moyen des ménages tunisiens a reculé de 11,1 % entre 2019 et 2025, après ajustement pour l’inflation. Le rapport met aussi en lumière une croissance de la consommation des ménages estimée à environ 3,8 % par an, alors que la croissance réelle du produit intérieur brut (PIB) reste bloquée autour de 2 % l’an, traduisant selon Fitch un phénomène où “le pays vit au-dessus de ses moyens”.

En détail, l’agence relève que le taux de croissance annuel de la consommation est supérieur à celui de l’épargne et plus rapide que celui de la croissance économique, ce qui accroit la vulnérabilité des ménages. Par ailleurs, le rapport évoque que près de 9 % des dépenses des ménages sont consacrées à des biens non essentiels (tabac, alcool, restaurants, internet), tandis que la part de la dépense en éducation atteint seulement 1,2 %.

Sur le plan des revenus, l’étude recense que 95 % des ménages disposent d’un revenu disponible annuel inférieur à 10 000 dollars, tandis que seulement 2 % des ménages dépassent ce seuil fixé à 50 000 dollars annuels. Environ 20 % des ménages seraient ceux ayant un revenu annuel inférieur à 5 000 dollars.

Ce tableau s’inscrit dans un contexte global particulièrement difficile : le taux de croissance réel du PIB tunisien avait été estimé à 0,5 % en 2023, passant à 1,3 % prévu pour 2024.  De l’autre côté, l’inflation demeure élevée et freine la capacité d’achat des ménages.

Pour les experts de Fitch, ce phénomène de consommation “au-dessus des moyens” constitue un risque structurel : non seulement les dépenses s’accroissent plus vite que les ressources, mais l’épargne se réduit, d’où une moindre résilience face aux chocs économiques externes.

Le rapport interroge également l’efficacité des politiques sociales et de l’emploi menées en Tunisie depuis 2019. Le chômage reste élevé, la création d’emplois stagnante, tandis que les dispositifs tels que les entreprises communautaires sont jugés “mal conçus” par l’agence.

Toujours selon la même source, face à  cette situation la Tunisie se trouve aujourd’hui à un carrefour délicat : le ralentissement de la croissance, la baisse du pouvoir d’achat et l’augmentation de la consommation par rapport aux ressources fragilisent les ménages et mettent sous pression les politiques publiques. Fitch Solutions ajoute que sans mesures structurelles ambitieuses, le niveau de pouvoir d’achat de 2019 ne sera probablement pas retrouvé d’ici à la fin de 2028.

Ainsi, les autorités tunisiennes et les acteurs sociaux sont donc appelés à repenser les mécanismes d’appui aux ménages, stimuler l’emploi et l’épargne, et mieux contrôler la structure des dépenses familiales pour éviter une détérioration plus profonde de la situation économique.

Auteur

Meriem KHDIMALLAH