UGTT – Entre grève et congrès contesté : La centrale syndicale s’enlise dans ses contradictions
Les tensions internes à l’Union générale tunisienne du travail (Ugtt) se sont nettement ravivées ces derniers jours, sur fond de contestation du leadership de l’actuel secrétaire général, Noureddine Taboubi.
Certains cadres contestent en effet «la légalité» de son mandat renouvelé en 2022.
La Presse — À ces fractures organisationnelles s’ajoutent des divergences profondes sur la stratégie à adopter à l’égard du gouvernement.
Certains responsables jugent les appels à la grève inappropriés et d’autres voient désormais la direction syndicale comme une «élite distante de sa base», accentuant même les interrogations sur sa légitimité.
C’est dans ce contexte que la Commission administrative s’est réunie pour fixer la date de la grève générale annoncée depuis un pays étranger par le secrétaire général adjoint Hfaiedh Hfaiedh.
Mais, pour de nombreux acteurs syndicaux internes, cette montée au front est une piètre manœuvre de botter en touche et détourner les regards d’une crise de confiance profonde et jamais observée auparavant qui secoue la centrale syndicale.
En effet, certains accusent la direction actuelle d’instrumentaliser le bras de fer avec le pouvoir pour détourner l’attention de son propre discrédit, tandis que d’autres voix évoquent une base syndicale désabusée, réclamant un congrès extraordinaire et le renouvellement du bureau exécutif.
Ce malaise n’est pas nouveau. En effet, en septembre 2024, il a éclaté au grand jour lorsque le secrétaire général adjoint, Samir Cheffi, a été violemment apostrophé par des syndicalistes en colère, qui lui ont barré la route devant le siège de l’Ugtt à Tunis.
Un épisode inédit révélateur d’un conflit latent qui couvait en raison du Congrès non électif tenu en juillet 2021 en pleine pandémie à Sousse et marqué par l’amendement controversé de l’article 20.
Cet amendement avait ouvert la voie à la prolongation des mandats, avant que le 25e congrès de février 2022 à Sfax ne reconduise l’essentiel de l’ancienne équipe. Malgré ces tensions, la Commission administrative a acté une grève générale pour le 21 janvier 2026.
Parallèlement, un conflit ouvert oppose désormais deux courants quant à la date du prochain congrès. L’un défend l’échéance du 25-27 mars 2026, l’autre réclame un report pur et simple à l’été au nom de «garanties juridiques supplémentaires».
Cette rivalité est telle que des menaces de démission ont émergé au sein même de la direction de la centrale syndicale.
Au final, entre une grève qu’elle présente comme indispensable et un congrès interne vivement contesté, l’Ugtt s’enlise dans ses propres contradictions.
Elle cherche à affirmer son rôle de contre-pouvoir tout en étant fragilisée par des tensions internes qui brouillent le sens même de son action.