Le Théâtre de l’Opéra de Tunis a accueilli lors de la soirée du 26 décembre un concert musical d’exception porté par un concept inédit.
Les chefs d’orchestre professionnels ont cédé leurs baguettes à de jeunes talents prometteurs et déterminés, tunisiens et étrangers, tous âgés de 13 à 24 ans.
La Presse — Ces derniers ont dirigé une trentaine de musiciens de l’Orchestre Symphonique Tunisien (OST) dans le cadre d’un programme éclectique. C’est le maestro Shady Garfi, directeur artistique de l’OST, qui s’est chargé de l’arrangement orchestral. Le résultat fut un spectacle répondant à tous les goûts et qui confirme que la valeur n’attend pas le nombre des années. Cet événement a réuni de nombreux musiciens et journalistes, en présence de Madame la ministre des Affaires culturelles Amina Srarfi.
C’est le dernier rendez-vous de l’année d’une série de concerts intitulée «La Nuit des chefs» où l’OST partage la scène à chaque édition avec des invités musiciens, chanteurs et maestros de Tunisie et d’ailleurs. Le concept attire un public nombreux et a fait une tournée estivale très réussie incluant le Festival international de Carthage, Hammamet et El Jem. Son point fort, c’est de croiser des univers musicaux divers, allant des classiques symphoniques aux créations plus contemporaines et rythmées.
Le public a applaudi d’abord la cheffe d’orchestre Mariem Oueslati du conservatoire Les Solistes. À seulement 19 ans, elle a pris les commandes des musiciens avec une maturité digne des plus grandes. Les artistes ont joué des œuvres du compositeur viennois légendaire Mozart. Ensuite, ce fut au tour du maestro français Victor Petrovic de monter sur scène. Àgé de 22 ans, il est diplômé du Conservatoire de Levallois-Perret et membre actif de l’Académie chorale de l’Ile de France.
Pour cette soirée au Théâtre de l’Opéra de Tunis, il a été à la tête de l’orchestre pour un extrait de l’opéra «Le Bourgeois Gentilhomme», une œuvre emblématique du théâtre baroque français. Cette comédie-ballet a été créée par Molière avec des partitions de Jean-Baptiste Lully, considéré comme fondateur de l’opéra français. Les musiciens ont été accompagnés par le chœur de l’OST pour offrir une version chantée du passage joué, apportant une dimension vocale puissante et saisissante.
Les spectateurs ont accueilli par la suite le saxophoniste et chef d’orchestre français Antoine Morez, âgé de 17 ans, pour d’autres morceaux du répertoire classique. Juliette Nounay Legros, du Conservatoire à Rayonnement Régional (CRR) de Nice, a assuré la direction musicale des extraits de Casse-Noisette, célèbre ballet composé par Tchaïkovski. La jeune virtuose n’a pas encore dépassé 13 ans, mais son talent et ses diverses prestations à l’échelle internationale l’ont déjà hissée au rang des grands.
C’est la musique tunisienne qui a pris la relève, sous la baguette de Haroun Karoui, étudiant à l’Institut supérieur de musique de Tunis. Les musiciens ont joué des airs de Kaddour Srarfi, ainsi que la célèbre chanson «Tounes al majd» pour laquelle ils ont été rejoints par la chorale de l’Orchestre Symphonique Tunisien. Cette chanson patriotique a été composée par le saxophoniste tunisien feu Fayçal Karoui. Pierrick de Wismes lui a succédé pour un passage dédié aux musiques de films.
Le jeune maestro et trompettiste, âgé de 17 ans, a récemment rejoint l’Orchestre des Campus de Grenoble. Il a également fondé l’orchestre Divert’iño, qui regroupe une vingtaine de jeunes musiciens, où il exerce en tant qu’arrangeur et directeur orchestral. Lors de ce concert, il a été à la tête de l’OST pour une compilation de morceaux de la bande originale du film «Aladdin» signée Alan Menken, suivie de compositions d’Ennio Morricone. Ces mélodies populaires au rythme entraînant ont particulièrement conquis l’audience.
Chaque prestation a été fortement applaudie, témoignant de l’admiration du public pour la maîtrise et la sensibilité des interprètes. Les jeunes chefs ont en effet assuré la direction de l’orchestre sans failles. Leur présence scénique et leurs expressions captées sur grand écran, concentrés et entièrement absorbés par la musique, ne laissent pas indifférent.
Le spectacle a été clôturé par «Tabaani nebniou edenya zina», un titre emblématique signé Hedi Jouini. Pour cette chanson tunisienne aux paroles intenses et pleines de sens, les jeunes maestros tunisiens et étrangers ont pris tour à tour la baguette pour guider les musiciens. Un geste symbolique qui illustre la valeur de la collaboration et la transmission artistique et met à l’honneur l’héritage musical tunisien.
Sur une heure et demie environ, les maestros prodiges venant de divers horizons ont imprimé chacun sa vision, sa sensibilité et son énergie à l’ensemble symphonique. Cette pluralité de baguettes et de répertoires musicaux qui fait l’originalité du concept « La Nuit des Chefs» a cette fois été sublimée par l’implication de la nouvelle génération.
Le public a ainsi découvert un dialogue inédit entre jeunesse et expérience, où passion et qualité résonnent avec l’enthousiasme et l’énergie communicative des jeunes chefs, offrant une expérience musicale qui touche autant le cœur que l’esprit.

