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Editorial

Le clic devance toujours la loi

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  • 14 novembre 10:00
  • 2 min de lecture
Le clic devance toujours la loi

Dans le grand théâtre de l’économie numérique tunisienne, une scène se joue à guichets fermés : celle d’un commerce en ligne estimé à 1,7 milliard de dinars, animé par plus de 7.500 vendeurs opérant sans identifiant fiscal. Autrement dit, un marché parallèle, fluide comme un flux numérique, qui échappe à la pesanteur de la loi.

Ce chiffre n’est pas qu’une donnée comptable : il incarne le dilemme de la modernité tunisienne. D’un côté, la vitalité d’une jeunesse entreprenante, inventive, qui a fait du smartphone son échoppe et du paiement à la livraison sa vitrine. De l’autre, un État qui tente de rattraper la fiscalité au galop d’Internet, dans un monde où le clic devance toujours la loi.

L’évasion fiscale, ici, n’a plus le visage classique de la fraude. Elle se drape dans les codes de l’innocence : le colis, la commande, la promotion. Pourtant, derrière chaque panier virtuel non déclaré, c’est une part de la solidarité nationale qui s’évapore. Le commerce parallèle en ligne ne se contente plus d’être un symptôme: il devient un écosystème invisible, où prospèrent la débrouille, la défiance et, parfois, la contrebande.

 Résultat des courses : le consommateur, étranglé par un pouvoir d’achat en chute libre, choisit l’économie de survie — sans savoir qu’il scie la branche du service public sur laquelle il est assis.

Faut-il alors traquer ces vendeurs numériques comme on traquait jadis les contrebandiers du port ? Non. Il faut les intégrer. La fiscalité de demain doit devenir un levier d’inclusion, non un instrument de sanction. Car l’économie digitale ne supporte ni la peur ni la paperasse.

La ministre des Finances l’a bien compris: la digitalisation des services financiers, prévue dès 2026, est la clé de voûte d’un nouveau contrat fiscal — un contrat intelligent, fondé sur la traçabilité et la transparence.

Mais cette mutation exigera une pédagogie sociale : expliquer que payer l’impôt, c’est participer à la stabilité numérique de la Nation.

L’impôt doit redevenir un signe d’appartenance, pas une punition.

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Auteur

Salem Trabelsi