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Economie

Rétrospective – Tourisme en Tunisie : Une dynamique encourageante face à des déséquilibres structurels

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  • 28 décembre 18:45
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Rétrospective – Tourisme en Tunisie : Une dynamique encourageante face  à des déséquilibres structurels

En 2025, le secteur touristique tunisien montre des signes de reprise, après plusieurs années marquées par des crises structurelles et conjoncturelles. Malgré les fermetures massives d’hôtels et les contraintes sur les infrastructures, les chiffres de fréquentation confirment un regain d’activité. Houssem Ben Azouz, président de la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien, souligne que cette dynamique contribue non seulement aux rentrées en devises, mais aussi à l’emploi et à l’activité économique locale, tout en révélant les défis structurels persistants qui nécessitent des réformes et des investissements ciblés pour garantir la compétitivité du secteur à long terme.

La Presse — Le secteur touristique constitue l’un des piliers majeurs de l’économie tunisienne. Pour l’année 2025, Houssem Ben Azouz, président de la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien, a indiqué que les chiffres confirment une reprise notable du secteur.

Les indicateurs de performance du nombre d’entrées et unités opérationnelles montrent une évolution positive. Il a également mentionné que les marchés traditionnels recommencent à se redynamiser, tandis que les marchés voisins, algérien et libyen, représentent désormais environ 60 % des flux touristiques, contre 30 à 40 % pour le marché européen.

Une crise hôtellière ?

Le tourisme continue de jouer un rôle central dans l’économie nationale, représentant une part importante des rentrées en devises et contribue à l’emploi. Cependant, Ben Azouz a souligné que la crise majeure touche principalement l’hôtellerie, et non le tourisme dans son ensemble. Les chiffres parlent : le nombre de lits a chuté de 240.000 avant la révolution à 170.000 aujourd’hui, soit une perte de 72.000 lits. Près de 170 hôtels ont fermé dans toutes les régions, ce qui reflète des problèmes structurels liés à la conception initiale et à la stratégie adoptée dans les années 70, 80 et 90.

Selon Houssem, ces fermetures révèlent quatre grandes erreurs : une mauvaise conception de l’hébergement hôtelier, des crédits bancaires trop élevés dans les années 80-90, un déficit de qualification des investisseurs et des promoteurs, et des problèmes d’aménagement des zones touristiques, notamment la concurrence entre hôtels bien situés et les autres, créant une guerre des prix.

Malgré ces difficultés, la diversification de l’offre touristique tunisienne a permis d’attirer de nouveaux segments de clientèle. Il a précisé que le tourisme hors saison, comme le tourisme culturel, écologique, saharien ou médical, est en train de se développer et permet d’aller au-delà d’une simple période estivale de quelques mois. Cette extension permet par ailleurs, d’étendre l’activité à toutes les régions et d’augmenter les budgets. Il a ajouté que ce type de tourisme attire une clientèle plus aisée, améliore l’image de la Tunisie et contribue à un développement équilibré.

Un décalage avec les besoins locaux

Cependant, la promotion des produits touristiques reste insuffisante. Tunis, par exemple, n’est pas encore reconnue comme destination culturelle, malgré son patrimoine riche. Le budget alloué à la promotion touristique, estimé à 60 millions de dinars, reste très faible par rapport aux besoins, surtout face à des concurrents comme la Turquie, le Maroc ou l’Égypte, qui investissent massivement dans la promotion.

Houssem a également évoqué le rôle limité des hôtels pour la classe moyenne tunisienne. Sur les 25 millions de nuitées, 6 millions sont consommées par des tunisiens, souvent dans des maisons d’hôtes ou des gîtes. La plupart des hôtels existants sont conçus pour la clientèle étrangère, ce qui crée un décalage avec les besoins locaux. Il a insisté sur la nécessité de développer des hébergements adaptés à la classe moyenne, à l’instar des campings, villages de vacances ou apparts-hôtels, comme cela se fait en France.

En termes d’infrastructures, le problème des hôtels fermés reste majeur. Ben Azouz a mentionné qu’il est indispensable de trouver des solutions de reconversion et de réaménagement des zones touristiques existantes, afin de maximiser l’utilisation des ressources et éviter de reproduire les erreurs passées.

De bonnes perspectives en vue

Pour 2026 et au-delà, les perspectives restent favorables. Les réservations sont encourageantes, et la reprise pourrait se poursuivre jusqu’en 2030, notamment si le marché russe retrouve son importance perdue après la guerre en Ukraine. Il a insisté sur la nécessité de continuer à diversifier les produits et les marchés, en ciblant l’Asie, l’Amérique et en consolidant les marchés traditionnels comme l’Europe occidentale.

Enfin, il a conclu que le tourisme tunisien doit s’appuyer sur une approche globale : corriger les erreurs structurelles, investir dans les infrastructures, adapter l’offre aux besoins des différentes clientèles et promouvoir la diversité des produits touristiques pour assurer la durabilité et la compétitivité du secteur.

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Auteur

Sabrine AHMED